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À quand l’Afrique ? Entretien avec René Holenstein

Joseph Ki-Zerbo Les éditions de l’Atelier, 2013 [L’Aube, 2003], 239 p., 10 €

Joseph Ki-Zerbo (1922-2006), ancien responsable politique burkinabé, livrait ici sa vision engagée des défis présents et futurs du continent africain. Divisé en grands thèmes (mondialisation, guerre et paix, démocratie, histoire, développement…), les entretiens qui composent cet ouvrage battent en brèche les clichés sur l’Afrique et refusent le fatalisme qui entoure la question du développement de la région. La pensée historique et politique de Ki-Zerbo s’inspire aussi bien du marxisme que du personnalisme de Mounier. Il milite en faveur d’une prise de conscience de l’identité africaine face à une mondialisation synonyme d’exploitation économique et d’assimilation culturelle. Il défend un projet de fédéralisme à l’échelle continentale pour résoudre la question de la fragilité économique des États subsahariens, celle des crispations identitaires et des nationalismes belliqueux. Mais ce panafricanisme mêle projet politique et analyse totalisante, passant sous silence les trajectoires propres à chaque État-nation africain. Pour l’auteur, l’embargo économique dont souffre l’Afrique ne sera résolu que lorsque celle-ci aura pris conscience de son potentiel et de sa capacité à surpasser elle-même les obstacles de la modernité capitaliste. Cette lecture dépendantiste de la trajectoire africaine est stimulante, mais quelque peu desservie par une vision idéalisée du moment précolonial. Ainsi, la question des droits humains, notamment des droits de la femme, est éclairée par une réelle expérience de terrain, mais l’insertion des femmes africaines risque d’être ramenée à une tradition précoloniale d’insoumission et de division égalitaire du travail social. La partie sur le développement et l’ouverture économique de l’Afrique fait l’impasse sur le rôle nouveau des émergents (Chine, Brésil, Inde…) sur le continent, dans une représentation univoque de la mondialisation comme frein absolu à « l’échange culturel équitable ».

Laurent Duarte
18 octobre 2013
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