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L’économie selon la Bible. Vers un modèle de développement

Richard Sitbon Eyrolles, 2013, 238 p., 14 €

Les tentatives ne manquent pas de tirer de la Bible (ici dans la tradition juive) des enseignements pour une pratique sociale, politique, voire économique. Le danger est bien connu : transposer sans précaution des institutions d’une autre époque, qui se justifiaient dans des contextes culturels, sociaux et religieux qui ne sont plus. La manière de réinterpréter les textes sacrés pour les couler dans les préoccupations d’aujourd’hui provoque toujours, comme ici, l’admiration du lecteur. Déjà, au XVIe siècle, la relecture par Jean Calvin des textes bibliques touchant le prêt à intérêt est un modèle du genre. Richard Sitbon, lui aussi, a le mérite de ne pas éluder les questions épineuses. Ainsi, les livres du Deutéronome et du Lévitique distinguent « le frère » à qui on doit prêter sans demander d’intérêt de « l’étranger » à qui on doit demander de payer un intérêt. Richard Sitbon ne se contente pas de rappeler les textes qui exigent le même traitement pour l’étranger dans la pauvreté et pour le frère ; il fonde son exégèse sur ce qui distingue nettement l’universalité musulmane ou chrétienne (et qui a justifié l’interdiction faite aux chrétiens de prêter à intérêt, même aux étrangers) et l’universalité juive, médiatisée par la nation. Plus classique, l’interprétation du repos sabbatique ou de l’année jubilaire, comme le rappelle l’interdiction d’une logique d’accumulation indéfinie. On retrouverait ici la méfiance des anciens Grecs contre la chrématistique, visant l’accumulation de richesses, au profit de l’art de l’échange et du commerce. Le principe d’universalisation médiatisé par la nation conduit tout naturellement l’auteur vers une position socio-économique proche du solidarisme, ce mouvement qui, sous la Troisième République française, visait à compléter – sinon à remplacer – la charité par une organisation publique. L’expérience d’un siècle et demi a montré que la logique solidariste, aussi nécessaire soit-elle, reste incapable de répondre aux situations les plus singulières qui échappent aux catégories administratives, même les mieux pensées. Ce qui replace au bon endroit la responsabilité de chacun, si bien mise en valeur dans la Bible.

Étienne Perrot
4 juillet 2013
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