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Raison et religion, la dialectique de la sécularisation

Jürgen Habermas et Jospeh Ratzinger Éd. Salvator, 2010, 96 p., 12 €

Le 19 janvier 2004, l’Académie catholique de Bavière organisait un débat entre le philosophe de l’éthique de la communication, Jürgen Habermas et le cardinal Joseph Ratzinger, alors préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Le thème de la soirée était le suivant : « Les fondements moraux prépolitiques d’un État libéral ». Florian Schuller, directeur de l’Académie, et Jean-Louis Schlegel, traducteur de l’ouvrage, présentent bien le contexte des deux interventions : la place des religions dans nos sociétés démocratiques sécularisées. L’exposé d’Habermas marque un jalon dans l’évolution de sa pensée : une constitution politique peut-elle seule garantir la solidarité qui doit régner dans une société libérale ou faut-il avoir recours aux religions ? Pour répondre à cette question, le philosophe et le théologien opèrent un détour par l’histoire, le premier pour montrer le rôle des religions dans l’émergence du droit positif dans les sociétés sécularisées, le second pour montrer l’origine du droit naturel dans les crises surgies de la religion. Leurs pensées convergent sur l’idée que foi et raison ont une fonction régulatrice pour se féconder mutuellement et surtout se limiter. Habermas reconnaît aux religions une « réserve de sens » dont la raison ne saurait se passer, tout en constatant une sécularisation croissante sans la dramatiser. Ratzinger, sans se résigner à cette disparition du christianisme souligne l’importance pour la pensée occidentale de revoir ses prétentions à l’universel. Tous deux montrent les liens intimes qui unissent christianisme et sociétés démocratiques dans un besoin mutuel : le christianisme comme une voix incontournable du débat public et l’éthique de la communication comme un lieu de rencontre et d’évolution pour la foi chrétienne. Ainsi la religion apparaît comme l’» autre » de la démocratie, tout comme la foi est l’» autre » de la raison. Cette rencontre inattendue en Allemagne éclaire d’un jour assez cru le vide français, souligne le traducteur, quand celui-ci se cantonne aux éternels débats sur le sens du principe de laïcité.

Paul Corset
12 décembre 2010
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