La philosophie peut-elle contribuer à forger des concepts capables non seulement de décrire la réalité sociale mais de servir l’analyse critique pour permettre la transformation de la société ? Avec ce livre-manifeste, Franck Fischbach entend retrouver l’héritage d’un puissant courant de pensée né à la fin du xviiie siècle et dont il nous restitue la cohérence et le développement. Si le terme de « philosophie sociale » est peu usité en France, il est très présent dans d’autres traditions (on pense, par exemple, en Allemagne à l’œuvre d’Axel Honneth) où il renvoie à toute une lignée de penseurs qui entendaient lier la réflexion sur les sciences sociales, la compréhension de l’homme dans ses conditions concrètes d’existence et la recherche des voies de l’émancipation (Marx, Simmel, Lukacs, Marcuse, entre autres…). Redonner toute sa force à cette démarche c’est en souligner la vitalité mais aussi montrer sa nécessité dans un contexte intellectuel où le renouveau de la philosophie politique depuis les années 80 n’a pas empêché le développement des souffrances sociales et la dépolitisation de la pensée. On le voit, l’auteur entend plaider pour une philosophie pleinement sociale : elle passe par l’attention aux dimensions collectives et historiques de la vie humaine ; elle rappelle aussi l’importance d’une réflexion engagée dans « la conquête des conditions sociales d’une vie accomplie pour le plus grand nombre ».