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Éloge du carburateur. Essai sur le sens et la valeur du travail

Matthew Crawford La Découverte, 2010, 248 p., 19 €

Il s’agit bien d’un essai, qui implique une réflexion argumentée, au-delà du simple témoignage. L’auteur américain, docteur en philosophie, a fui un travail rémunérateur de consultant pour retrouver l’intelligence que procure le contact avec la mécanique. Il ne nous propose pas les mémoires baba-cool d’un retour à la nature, encore moins l’évocation d’un refuge pour intellectuel en mal de domination symbolique. À la manière du célèbre détective Hercule Poirot, Matthew Crawford a compris que l’agilité et la maîtrise des doigts entraînent celles de l’intelligence. Telle était également l’hypothèse de l’anthropologue Leroi-Gourhan. L’auteur en tire quelques leçons de bon sens : les procédures omniprésentes, notamment les systèmes de contrôle électroniques, sont parfois sources d’erreurs qu’un mécanicien expérimenté ne commet pas ; la véritable formation déborde largement l’apprentissage de la logique ; le métier ne se confond pas avec l’identification à l’entreprise ; la distinction pertinente ne sépare pas les métiers intellectuels des métiers manuels, mais les métiers délocalisables et ceux qui s’adressent aux personnes ancrées dans un lieu. En dépit du cambouis étalé sur l’image de couverture, en renfort de l’évocation du mot carburateur, l’ouvrage, appuyé sur de solides références philosophiques (Kojève, Hannah Arendt, Heidegger, Platon), ouvre la voie d’un humanisme fondé sur un travail moins aliénant que la production industrielle.

Étienne Perrot
1er mai 2010
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