Le mot existence prend ici une couleur philosophique. Il s’agit d’une lecture de l’être au monde qui ne se satisfait point de la vulgate initiée par Aristote où la vérité immuable se cacherait derrière l’apparence. L’auteur s’appuie sur Maurice Bellet qui naguère illustra sa pensée dans une critique très fine de l’économisme. Dans une logique semblable, Christian Arnsperger tente ici une œuvre originale dans un vocabulaire rendu difficile car constamment réadapté. Les questions posées par Marx, les réponses apportées après guerre par Hayek, les tentatives de Rawls, l’œuvre d’Habermas, sont relues à frais nouveaux. Certes, chacun sait, face à la finitude du monde comme des existences personnelles, combien est illusoire l’accumulation des biens matériels et des gratifications sociales. Mais il est plus difficile de mettre en lumière cette sorte d’aliénation, qui n’est pas le propre du capitalisme, mais prend des couleurs spécifiques dans le système dominé par la finance. Ch. Arsperger présente les grands pans de l’économie, consommation, investissement, concurrence, travail, comme autant de miroirs qui, dans une spéculation sans fin, enferment dans une raison instrumentale et ferment la porte de la gratuité, de la solidarité et des droits humains. Nous rejoignons Etienne Perrot dans la conclusion de sa lecture : « Cette démarche « thérapeutique » gagnerait à se désencombrer des abondantes références universitaires. Elle gagnerait surtout à s’affronter à la forme la plus actuelle du capitalisme, l’économie de marché financier, qui conjugue des rationalités contradictoires. La financiarisation du monde ouvre en effet un champ prometteur à ce type d’approche existentielle inaugurée, non sans difficulté mais avec bonheur, par Christian Arsperger ».