Hélène Baudchon reprend et actualise l’excellent ouvrage de Monique Fouet, décédée en 1994. Elle en garde le même esprit dans la grande tradition économique qui part de la démographie, des institutions, et des comportements des acteurs, pour éclairer finalement dans un second temps les politiques et les atouts économiques. Cette conception historique de l’économie est très efficace ; elle permet de comprendre pourquoi la diminution spectaculaire de l’épargne américaine et l’accroissement de l’endettement des Etats-Unis ne tombent pas du ciel, mais qu’ils s’intègrent à la fois dans l’histoire des institutions, de la culture et des faits sociaux, pourquoi la durée moyenne de chômage est trois fois moindre outre-Atlantique qu’en Europe pour un taux de chômage sensiblement inférieur, n’en déplaise aux contempteurs du système américain, pourquoi enfin les changements très nets de politique et de réglementation touchant la monnaie comme le budget de l’Etat ne doivent pas tout au « pragmatisme américain ». La clarté de l’exposé est renforcée par des encarts sobres et bien faits, touchant la protection sociale aux Etats-Unis, la composition du patrimoine financier des ménages, l’accord nord-américain de libre échange, la faillite crapuleuse d’Enron début 2002. Le lecteur conservera l’impression argumentée d’un pays dont la santé économique sait d’autant mieux compenser les « infidélités du milieu » tant intérieur qu’extérieur, pour parler comme Georges Canguilhem, qu’il demeure, et pour longtemps, le moins vieilli des pays occidentaux.