Fruit d’une table ronde tenue à Rennes en septembre 1999 dans le cadre du sixième congrès de l’Association française de science politique, cet ouvrage se propose de décrypter les mutations qui ont pu affecter au cours de la période récente le système français de laïcité. Pour décrire cette métamorphose, quatre moments logiques ont été retenus. Le premier, consacré aux ancrages historiques, nous ramène à l’époque des fondations, sous Jules Ferry. Construite contre l’emprise catholique et sur la croyance de la supériorité de la raison sur la foi, la laïcité vise, sans méconnaître les cultes, à reléguer dans la sphère privée les appartenances religieuses. Cette conception, restée longtemps immuable, a commencé à être questionnée dans les années 70. Le deuxième moment consiste à inventorier les contraintes sociales qui ont pu faire considérer comme obsolète le modèle d’origine : montée de l’idéologie multiculturelle, unification européenne, débats autour de la laïcité scolaire… Le troisième s’attache à analyser les réflexions doctrinales qui ont contribué au changement : inflexion de la position de l’Eglise catholique, d’organisations laïques telle la Ligue de l’enseignement, tandis que le Grand Orient de France durcit plutôt la sienne, nouvelles analyses sociologiques… La dernière partie s’intéresse aux mutations normatives en cours notamment autour de la manière de pratiquer la séparation, de l’intégration de l’islam et des musulmans, du phénomène sectaire. Le débat est aujourd’hui entre ceux qui voudraient ne rien changer et ceux, de plus en plus nombreux, qui estiment normal que la laïcité, où ils reconnaissent une valeur, puisse trouver des expressions nouvelles dans un monde qui lui-même bouge.