Voici un trésor pour quiconque souhaite mieux comprendre ce qui se passe dans « la banlieue ». Fruit de la mise en commun de recherches sur les quartiers sensibles, cet ouvrage nous initie à la complexité des réalités, à distance d’une approche trop simpliste d’un milieu ouvrier en décomposition. Ainsi, les sociabilités fortes et faibles, les mobilités et les liens familiaux et ethniques dessinent autant de groupes différents résidant sur les mêmes territoires. L’analyse permet d’entrer de l’intérieur dans les stratégies d’adaptation de ces groupes, des solidarités communautaires des Turcs à l’enfermement de bandes juvéniles dans les espaces bien délimités qu’ils contrôlent. Au fil des pages se dévoile l’incapacité de l’État à construire avec les populations des réponses aux enjeux sociaux, faute de renoncer à la position de surplomb (héritée de la tradition républicaine) d’une administration qui sait, mieux que les populations, ce qu’il faut faire. Or résonne justement l’appel à une conversion à l’écoute des populations, y compris dans leur formulations infra-politiques, et à l’appui sur leurs ressources collectives. Sommes-nous prêts à voir en elles des acteurs plutôt que des « bénéficiaires » de notre société ? À faire avec eux, et non seulement pour eux ?