Avec une rigueur tout universitaire, Françoise Piotet organise ici un grand nombre de données sociologiques relatives à l’emploi et au travail. L’emploi vise le statut professionnel du producteur (ouvrier, employé, cadre, compensations diverses qui forgent la reconnaissance sociale de l’individu). Le travail désigne le métier vécu dans la relation du producteur au monde matériel ou symbolique. Le grand écart constaté entre l’emploi et le travail provient de la multiplication des niches économico-juridiques, engendrée par l’élargissement de l’espace économique, l’innovation technologique, les nouvelles formes d’organisation du travail, l’adaptation au coup par coup, sans politique d’ensemble, des métiers chahutés par les soubresauts de l’économie mondialisée. Tous ceux que préoccupe le décrochage économique français trouveront dans cet ouvrage les principales données sociales (temps de travail, organisations syndicales, inspection du travail, mise en œuvre des concertations prévues par le législateur) qui expliquent qu’au-delà d’une amélioration certaine du climat social, le statut des travailleurs français, en termes de conditions de travail, de chômage et de rémunération, demeure bien loin de ce qu’ont obtenu leurs voisins. Ceux–ci, notamment helvétiques, jouissent d’un environnement social plus apaisé (la grève y est quasiment inconnue), d’un chômage trois fois moindre, de conditions de travail et de rémunération bien meilleures. Il est vrai que la méfiance jacobine envers l’entreprise, la confiance aveugle envers la régulation publique et la défense des intérêts catégoriels cachés derrière l’idée d’intérêt général, ne facilitent pas la tâche française.