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Les nouveaux pouvoirs d'agir

Vanessa Wisnia-Weill Seuil, 2020, 112 p., 11,80 €

La notion de pouvoir d’agir, plus ou moins liée à l’empowerment d’un côté et à la capacité d’agir de l’autre, s’est peu à peu imposée dans les réflexions citoyennes et associatives. Les travaux d’ATD-Quart Monde ou ceux du Secours Catholique - Caritas France, tous deux cités ici, en constituent un exemple. L’intérêt de cet essai est de pluraliser cette notion, d’en expliciter les soubassements, mais aussi de la revisiter au regard des transitions écologiques, technologiques et économiques en cours. Vanessa Wisnia-Weill, experte des politiques éducatives et sociales dans les services du Premier ministre, pose qu’au niveau individuel le pouvoir d’agir se joue aujourd’hui dans cinq sphères principales : la production (travail et activités économiques) ; la consommation (pouvoir d’achat) ; la vie privée et intime (pouvoir d’aimer et réciprocité, incluant l’agir parental) ; la connaissance (pouvoir de connaître et se transformer au contact du monde) ; la participation citoyenne (démocratie, pouvoir d’agir en commun). Partant de la théorie des capabilités (Martha Nussbaum et Amartya Sen), elle puise aussi aux sources de celle de l’égalité complexe (Michael Walzer) ainsi qu’à celles de la liberté sociale et de la reconnaissance (Axel Honneth, Paul Ricœur) cherchant à « mieux articuler idéaux d’individualisation, justice sociale et liberté de tous ». Cette liberté est interprétée davantage comme « une puissance d’agir fortifiée par le sens de la réalité et de l’altérité » que comme « un libre choix » ; elle est toujours construite socialement et politiquement. Avec simplicité et finesse, l’ouvrage montre que dans chacune des cinq sphères énoncées – traitées successivement, par chapitre – existent des marges de manœuvre pour s’accomplir, en étant reconnu et « reconnaissant ». Dans chacune, y compris celle de l’intime, de nouveaux enjeux d’égalité se font jour. Ceux-ci peuvent d’ailleurs conduire à modifier l’action publique. Vanessa Wisnia-Weill avance ainsi différentes préconisations, appuyées souvent sur des rapports d’experts. En ce qui concerne les liens d’affection par exemple, « condition existentielle et politique » au sens fort, il est possible de « favoriser les regroupements d’amis à l’école, proposer des projets hors la classe, et surtout, au-delà des accueils de loisirs existants, structurer des tiers lieux ou des tiers-temps en dehors du cursus scolaire et de la famille ». Dans chaque sphère aussi, des réalisations concrètes : hackathons civiques ou « tiers lieux collaboratifs plus stabilisés contribuent aux démarches d’innovation responsable portées par des industriels ou des coopératives sur un territoire », ou encore « laboratoires citoyens construisant la gestion des espaces publics ». Bref : l’impuissance n’est jamais sûre.

Jean Vettraino
9 octobre 2020
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