Do not follow this hidden link or you will be blocked from this website !
Logo du site

De la bonne société. Le retour du politique en philosophie

Sylvie Courtine-Denamy Cerf, 2014, 320 p., 24 €

Une lecture exigeante, mais sur une question essentielle. Faut-il renoncer à déchiffrer les constructions politiques qui permettent la cohabitation pacifique entre les hommes désireux de bien vivre dans un monde politique déboussolé ? Après les bouleversements politiques des deux guerres mondiales, les régimes totalitaires de l’Allemagne nazie et de l’URSS, le déferlement technique, la menace d’une guerre atomique, ce livre entreprend d’interroger la manière dont trois philosophes, Leo Strauss, Hannah Arendt (tous deux juifs) et Eric Voegelin ont appréhendé l’événement de l’année 1933 que la philosophie politique n’avait pas su anticiper. Comment remettre au premier plan la question qui était celle de la philosophie classique, celle du vivre ensemble ? Après les horreurs nazies et bolcheviques, comment replacer au centre le souci du bon gouvernement de la société ? Comment penser une communauté politique et cosmopolitique, une « société bonne » dont l’unité et la cohérence demeurent respectueuses de la pluralité ? Pour tenter d’y répondre, l’auteure renoue les fils des dialogues, souvent tendus, entre ces trois remarquables intellectuels d’une même génération. La question qui les divise et les rapproche tourne autour d’une interrogation majeure : qu’est-ce que la politique ? Cette interrogation rend ce livre certes difficile et touffu, mais original et sans équivalent. C’est Hannah Arendt qui, à l’évidence, élabore la réponse la plus stimulante dans la ligne de son héritage augustinien sur la nouveauté et le commencement qui président à toute naissance. La politique, écrit-elle, apparaît comme « action », « mise en relation » d’être humains tous pareils sans qu’aucun ne soit pourtant identique à l’autre ; son objet n’est pas l’homme, mais le monde, cet espace qui crée tout rassemblement des hommes, un espace qui, simultanément, s’intercale entre eux, les sépare.

Henri Madelin
17 mars 2015
* Champs requis
Séparé les destinataires par des points virgules