La réédition en poche de ce livre de référence sur le « travail du consommateur » (2008) est une excellente nouvelle. La sociologue Marie-Anne Dujarier y analyse, à partir d’une vaste enquête empirique et d’une lecture attentive de la littérature marketing et managériale, les « formes d’activités productrices génératrices de valeur pour les fournisseurs et réalisées bénévolement par les consommateurs. » Elle en distingue trois configurations-types, décrivant à chaque fois les activités prescrites, réelles, réalisées et vécues par les consommateurs et montrant ce qui les motive. L’« autoproduction dirigée », d’abord, dont le but pour l’entreprise est d’externaliser et de réduire les coûts, par exemple par le développement du self-service, des caisses des supermarchés aux bornes des aéroports. La « coproduction collaborative », ensuite, proche de la notion de crowdsourcing, en rapide développement avec le Web 2.0 (mais ne s’y réduisant pas). Il s’agit ici pour les entreprises de capter informations, idées et productions bénévoles afin de créer de la valeur, principalement à partir de la publicité (vente d’espaces publicitaires, fichiers de consommateurs, etc.). Le « travail d’organisation », enfin, qui, s’il ne produit pas directement de la valeur, est non moins essentiel, car les multiples actions des consommateurs participent à la construction et au bon fonctionnement du marché. Au final, on assisterait à une « nouvelle division du travail », qui interroge celui-ci, brouillant la frontière entre les activités de production et de consommation. L’auteur revient sur ces points dans une utile postface et ouvre à un débat social naissant, dont les enjeux sont considérables : celui du statut de ces activités réalisées par des consommateurs lorsqu’elles sont encadrées par des organisations qui en tirent profit.