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Turquie : désir d’Europe ?

Cemoti Cahiers d’études sur la méditerranée orientale et le monde turco-iranien n° 36, 2003

Quelles attitudes ont les Turcs par rapport à une éventuelle adhésion à l’Union européenne ? Cette question, qui devrait recevoir une réponse en 2012, est mal connue en France et en Europe, où beaucoup craignent que la Turquie ne joue le rôle de cheval de Troie de l’islam en Europe. L’étude présentée ici ne veut être ni un plaidoyer, ni un réquisitoire. Elle montre que les difficultés à surmonter pour réaliser l’intégration viennent moins d’une opposition entre religions que d’un affrontement entre souverainismes qui dure depuis longtemps. D’un côté l’empire ottoman dont la république turque a repris l’héritage ; de l’autre les entreprises coloniales des Etats-nations européens. Tout ceci dans un contexte où la modernisation est devenue de part et d’autre le maître mot. En fait, le parti musulman modéré AKP, actuellement au pouvoir, joue plutôt le jeu de la démocratie, de la coopération internationale et des droits de l’homme. Le président Erdogan, négociateur tenace, ne laissera pas passer une concession (par exemple sur la politique chypriote) sans contrepartie. Un des auteurs examine les tendances de l’opinion publique turque, en s’appuyant sur les données des enquêtes Eurobaromètres de la Commission européenne et sur celles d’instituts turcs : 67 % des citoyens turcs estiment que l’adhésion serait une bonne chose, 10 % seulement une mauvaise chose ; 75 % des citoyens espèrent des bénéfices de l’adhésion pour le pays, 70 % des bénéfices personnels, 14 et 21 % aucun bénéfice ni pour le pays, ni personnel; on attend de l’Union plus de prospérité, plus de protection sociale, plus de liberté de circulation. Les avantages économiques et sociaux viennent au premier plan. Mais cette attitude positive à l’égard de l’adhésion se conjugue avec une faible connaissance des institutions européennes. Le sentiment d’appartenance nationale reste plus fort que celui d’appartenance à l’Union. Dans les études portant sur l`économie, sont rappelés les graves problèmes de l’inflation ; avec l’adhésion, se posera à terme la question de la participation turque à l’union économique et monétaire et au Pacte de stabilité et de croissance. A ce sujet, les hommes d’affaires turcs ne sont pas d’accord entre eux. Viennent encore complexifier la négociation les problèmes des minorités, en particulier kurdes. Il faut se préparer à de longues négociations d’adhésion mais cela est sans doute préférable à une rupture.

Jean Weydert
15 juin 2004
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