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Les économistes français et le marxisme; Apogée et déclin d’un discours critique (1950-2000)

Thierry Pouch

Le sujet méritait une étude ; elle est menée ici avec honnêteté par Thierry Pouch qui a relu les principales publications et interviewé une cinquantaine d’économistes universitaires français positionnés naguère par rapport à Marx, de Henri Denis à Gérard Destane de Bernis, en passant par Alain Lipietz, Henri Bartoli, Patrick Maurisson… mais, curieusement, ni Michel Aglietta, ni Christian Palloix, ni François Morin, ni Hervé Lorenzi, ni Carlo Benetti, ni bien d’autres. Le résultat est tout de même impressionnant. Le lecteur voit émerger l’intérêt des économistes pour Marx à la fin de la guerre, dans la mouvance de l’humanisme chrétien. Bartoli et Perroux y sont pour quelque chose. Les problématiques marxistes de l’économie dominent le champ universitaire dans les années 70, au moment même où la crise économique appelait des analyses de société plus large que l’équilibre général, pour décliner rapidement depuis le début des années 80. De ce déclin, les contradictions de la formalisation de Marx, polarisées ad nauseam dans les années 75 sur le problème insoluble de la transformation de la valeur en prix de production, stigmatisées par la déconfiture de l’empire soviétique, n’en sont que les prétextes. Bortkiewicz, voici bientôt un siècle, avait montré les incohérences formelles du troisième livre du Capital. Quant à la faillite de l’économie administrée, elle était analysée dès le début des années 60 notamment par Henri Chambre, un fin connaisseur du système soviétique. La véritable raison du déclin de l’approche universitaire marxiste en économie, évoquée comme à regret par l’auteur, est d’ordre épistémologique. La critique de l’économie ne relève pas du même champ épistémologique que l’économie elle-même. Contrairement à ce que laisse percevoir la nostalgie des dernières pages de l’ouvrage, il n’est pas certain d’ailleurs que la crise annoncée du capitalisme redonne force et vigueur à la critique marxiste dont les intérêts sont désormais bien trop liés aux appareils d’Etat et aux statuts universitaires pour percevoir ce qu’a d’irréductible le risque économique, seule justification possible du capital, point aveugle de tous les cléricalismes d’Etat.

Yann Galenna
4 juillet 2001
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