Une revue bimestrielle, exigeante et accessible, au croisement entre le monde de la recherche et les associations de terrain.
Depuis une douzaine d’années, le Maroc est confronté à des mouvements migratoires croissants. Les migrants subsahariens attendent, dans des conditions inhumaines, l’opportunité de passer en Europe, bien souvent au risque de leur vie. Les troubles politiques, les guerres, mais aussi des raisons économiques et l’espoir d’un avenir meilleur poussent ces personnes sur le chemin de l’exil. Au Maroc, la plupart des migrants vivent dans des conditions extrêmement précaires, en marge de la société, dans la crainte d’être arrêtés et reconduits aux frontières algérienne et mauritanienne. Leur nombre est actuellement estimé entre 8 000 et 15 000.
À mon sens, la nouvelle phase des Objectifs du millénaire (OMD) qui s’ouvre après 2015 devra viser les objectifs suivants : sur le plan juridique, garantir à tout nouveau né d’avoir un acte de naissance. Disposer d’un acte de naissance, c’est théoriquement avoir la garantie de pouvoir être inscrit à l’école. C’est avoir une identité, c’est exister. Cette reconnaissance peut contribuer à lutter contre les phénomènes de trafic et de traite des êtres humains, dont les proies les plus vulnérables sont celles qui « n’existent » même pas aux yeux de l’État. Plus tard peut-être, elle offrira la possibilité de disposer d’un passeport, de pouvoir voter, de se marier et d’être reconnu par les autorités de son pays. Et cet enjeu concerne aussi les personnes décédées loin de leur pays d’origine, et qu’il est impossible d’enterrer dignement sans avoir la certitude de leur identité et de leur nationalité.
Plus largement, l’enjeu est de restaurer la dignité de chacun, quelle que soit sa supposée différence (sexe, religion, orientation sexuelle) et la lui laisser vivre, dans le respect des droits de chacun et de la liberté d’autrui. La Déclaration universelle des droits de l’homme souligne que l’ignorance et le mépris des droits de l’homme sont les causes des malheurs publics. De même, l’ignorance de l’autre est la cause de son malheur. Ne pas accepter l’autre, ne pas le reconnaître dans sa plénitude, c’est le nier, le bafouer. C’est, dans certains cas, s’autoriser à faire usage de procédés illégaux et inhumains (lui tirer dessus sans autorisation légale, ou avec des balles de fusil de chasse, comme sur un animal...).
« L’emploi informel est une cause de mépris des droits de l’homme : refus de paiement, exploitation… »
Sur le plan économique, cette reconnaissance suppose d’assurer la délivrance de fiches de paie aux employés, leur inscription aux caisses de sécurité sociale et l’inscription juridique du statut d’employé pour tous les travailleurs informels. Car l’emploi informel est une cause de mépris des droits de l’homme : refus de paiement, exploitation… Il ne permet pas aux travailleurs d’acheter à crédit de façon sécurisée, et les contraint à une précarité permanente, même arrivés à l’âge « légal » de la retraite où ils ne percevront rien pour toute une vie de travail. Lutter contre l’emploi informel, c’est d’ailleurs aussi, en assurant des revenus aux caisses de sécurité sociale, contribuer à la solidarité nationale.
Et vous, quels objectifs fixeriez-vous ?
Ils s’y sont essayés, et vous ? Nous vous encourageons à nous proposer vos propres objectifs pour le développement, en respectant les instructions aux auteurs.
« Financer l’après-2015 par une fiscalité juste », par Dereje Alemayehu (Éthiopie), Alliance globale pour la justice fiscale
« Un revenu minimum pour éradiquer la misère », par Judith Randel (Royaume-Uni), Development Initiatives
« Prendre les plus délaissés comme partenaires », par Isabelle Pypaert Perrin (Belgique), Mouvement international ATD Quart Monde
« Tourner le secteur privé vers l’intérêt général », Nathalie Péré-Marzano (France), Crid, Action mondiale contre la pauvreté-France
« Dénucléariser Israël », par Michel Warschawski (Israel), Centre d’information alternative de Jérusalem
« Défendre les petits agriculteurs », par Ndiakhate Fall (Sénégal), Conseil national de concertation et de coopération des ruraux/Via Campesina
« L’éminente responsabilité des pays ‘développés’ », par Christian Comeliau (France), économiste du développement