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Accélération. Une critique sociale du temps

Hartmut Rosa La Découverte Poche, 2013 [2010 pour la 1re édition française, traduit par Didier Renault], 486 p., 14 €

Accélération est un livre fondateur pour la pensée d’Hartmut Rosa. Deux ans avant Aliénation et accélération, l’auteur y développe les fondements de sa théorie sociale. Rosa vient combler un manque dans la pensée sociale occidentale. Paradoxalement, alors que notre « modernité tardive » est en proie au sentiment perpétuel que « tout ce qui avait été solidité et permanence part en fumée » (Marx), les pensées du temps sont disparates. L’auteur entreprend dans ce livre de les systématiser et de construire une « critique sociale du temps ». Enclenchée au XIXe siècle avec les premières étincelles de la modernité, les grandes dimensions de l’accélération sociale, l’accélération technique, l’accélération du rythme de vie et l’accélération du changement social connaissent depuis lors une extension exponentielle, s’alimentant les unes les autres comme en un cercle infernal. Cette accélération permanente finit par saper les fondements-mêmes de la modernité : démocratie, éducation, projet de vie individuel… Ce qui entraîne toute une série de paradoxes dans notre société occidentale contemporaine : besoin d’une « liquidité », incapacités à prendre des décisions, stress et, en un sens, « détemporalisation » de l’histoire. La vie de l’individu moderne traverse ainsi une succession d’accélérations très brutales et de moments de pétrification. L’auteur en vient à pronostiquer une société bientôt prise dans une « immobilité fulgurante », paradoxe absolu d’une incapacité de supporter sa propre addiction à l’accélération. N’est-ce pas sur ce dernier récif que finit par s’échouer Hartmut Rosa ? Fasciné par cette société en perpétuelle accélération, il semble lui-même pétrifié par son propre sujet. Le livre se termine sur une conclusion particulièrement inquiète, entrouvrant seulement la porte à d’autres issues qu’une « révolution radicale » ou une « catastrophe finale ». Pour montrer le rôle émancipateur de la sociologie, peut-être l’auteur aurait-il pu explorer, fusse aux frontières de notre société, des raisons d’espérer en un autre avenir…

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