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Dossier : Extrême droite : écouter, comprendre, agir

La conversion sociale du FN, mythe ou réalité ?

En invoquant la justice sociale, Marine Le Pen sème le trouble. Le Front national serait-il passé à gauche ? L’analyse historique montre que c’est pour conquérir un électorat ouvrier et populaire que le FN a infléchi son discours. Sans renier ses fondements idéologiques.

« On peut être amené à défendre des idées qui rejoignent celles du Front national », constatent, troublés, certains militants associatifs. Rappelons cette séquence de fin 2014 : Thierry Lepaon, alors secrétaire général de la Confédération générale du travail (CGT), se trouve en séance du bureau confédéral de son syndicat. Il lit à haute voix un tract dont les grandes lignes sont, entre autres, un nécessaire protectionnisme et la défense des services publics par un État stratège recouvrant sa souveraineté « bradée » à Bruxelles. Il récolte l’assentiment général de ses camarades. « Il y a juste un problème », explique-t-il. « Ces éléments de langage ne proviennent pas de chez nous. Ce tract a été rédigé par des gens du Front national. Alors on fait quoi maintenant ? »

Le Front national (FN) a toujours porté une attention particulière à son vocabulaire1. En témoigne cet extrait d’une brochure interne du début des années 1990 : « Aucun mot n’est innocent. On peut même dire que les mots sont des armes, parce que derrière chaque mot se cache un arrière-plan idéologique et politique.2 » Le FN avance-t-il masqué ? Le choix des mots n’induit pas seulement certains citoyens et électeurs à confusion. Le FN entend détourner le sens de thèmes fondamentaux qu’il reprend à son compte. Depuis plusieurs décennies, il s’approprie des termes, marqueurs et références historiques de l’adversaire. La conversion sociale du FN est-elle un mythe ou une réalité ?

Une droite sociale, nationale, populaire

Dès ses débuts, le FN réfute le qualificatif d’extrême droite. Trois adjectifs (social, populaire, national), rattachés au vocable « droite », définissent le Front national pour l’unité française lors de son apparition dans le paysage politique français en octobre 1972 : « La droite sociale, ennemie des monopoles capitalistes et des professionnels de la lutte de classe, qui ne refuse pas le progrès, mais entend le soumettre aux seuls intérêts de l’homme. La droite populaire, héritière des traditions humanistes qui ont forgé le visage de notre peuple : amour et goût de la terre, respect du travail, joie de l’amour et de la famille, sens de la responsabilité, loyauté des gouvernants, esprit de sacrifice et de fraternité. La droite nationale, pour qui l’amour de la patrie est la forme la plus haute de la solidarité entre les hommes de notre peuple, respectueuse à la fois des anciens qui ont lutté et souffert pour que nous vivions libres et de ceux qui viennent à nous et à qui nous devons transmettre l’héritage.3 »

C’est une des premières affiches du FN, imprimée début 1973. Sur fond blanc se détachent en lettres capitales rouges : « HALTE AU CHÔMAGE, LE TRAVAIL aux FRANÇAIS ». La défense de l’identité nationale est ainsi ramenée sur le terrain social, celui de la gauche, et non sur le plan racial. Le FN entend, dès l’origine, draguer les classes populaires tout en préservant son anticommunisme. Son marqueur central – « la préférence nationale » – s’impose quelques années plus tard. La thématique anti-immigration prend corps sous l’impulsion de l’idéologue François Duprat. Une affiche réactualisée à trois reprises (« 1 million de chômeurs, c’est 1 million d’immigrés de trop ! La France et les Français d’abord ! ») expose la nouvelle orientation rhétorique. L’immigration est présentée comme un « problème excessivement grave au regard de [la] situation économique et sociale ». « Les immigrés (…) reviennent plus cher que les Français et ils empêchent la révolution pacifique moderne qu’est la revalorisation du travail manuel4. »

Lors de son septième congrès, en 1985, le FN ne se contente pas de confirmer sa stratégie de rassemblement des déçus de la droite. Il affirme vouloir s’ouvrir à d’autres catégories sociales, notamment les ouvriers, agriculteurs et employés, en défendant un « système de création de richesses pour tous et non un système qui ne favoriserait que les riches. »

Le FN affirme vouloir défendre un « système de création de richesses pour tous et non un système qui ne favoriserait que les riches. »

Trois ans plus tard, à l’occasion du 1er mai 1988, le FN défile pour la première fois seul, en s’affranchissant des autres groupes de l’extrême droite française. Jean-Marie Le Pen veut faire de ce jour de la fête du travail une « immense manifestation nationale et populaire5 », ce que son parti justifie ainsi : « Dans les premières décennies de ce siècle, le 1er mai était considéré comme une journée quasi révolutionnaire, où les partis et les syndicats de l’extrême gauche mobilisaient les masses militantes sous une foison de drapeaux rouges et défilaient sur des kilomètres de pavé parisien. En 1941, le maréchal Pétain décida de transformer cette journée d’affrontements sociaux en une fête du travail, officiellement chômée, et une manifestation d’unité française. La gauche et l’extrême gauche s’efforceront de refaire peu à peu du 1er mai leur propre fête partisane et revendicative. Le Front national brise ce monopole syndicalo-gauchiste et parvient à unir symboliquement, dans une même ferveur, l’hommage à Jeanne d’Arc et le salut fraternel à l’ensemble du monde du travail, faisant de cette journée à la fois une manifestation de patriotisme et de solidarité nationale6. »

Aux élections européennes de juin 1984, le FN recueille près de 11 % des suffrages. Dix députés sont élus. Aux législatives du printemps 1986, il affiche 35 députés, élus sous l’étiquette « Rassemblement national ». Le parti s’impose dès lors dans le paysage politique français. Bruno Mégret (nommé délégué général en novembre 1988) est l’un des artisans d’une nouvelle stratégie qui repose sur une certitude : si le FN veut arriver au pouvoir, il doit changer d’image. C’est le début de la « dédiabolisation ».

« Le premier mouvement ouvrier de France »

Pour accroître son implantation, le FN fait du combat social le « troisième pilier de crédibilité » de son programme, après l’« insécurité » et la « lutte contre l’immigration ». Les « 51 mesures (…) pour faire le point sur le social » (B. Mégret, 1992) doivent être considérées comme une première étape. Trois ans plus tard, lors de la présidentielle, Jean-Marie Le Pen obtient 15,3 % des suffrages exprimés au premier tour et le FN arrive en tête, pour la première fois, chez les ouvriers et les chômeurs. Pascal Perrineau parle de vote « gaucho-lepéniste ». Nonna Mayer parle elle d’« ouvriéro-lepénisme » : ce sont « avant tout des ouvriers qui se tournent vers le Front national. Et ils ne sont pas nécessairement de gauche, contrairement à ce que suggère le terme de ‘gaucho-lepénisme’. Il ne s’agit pas de n’importe quels ouvriers, mais de la fraction la plus ‘ouvrière’ d’entre eux7 ». Le FN se voit comme « le premier mouvement ouvrier de France (...). 30 % des ouvriers, 21 % des artisans et des petits commerçants, 34 % des classes les plus défavorisées lui ont apporté leurs suffrages. 19 % des hommes de 18 à 24 ans, 16 % des femmes de 25 à 34 ans ont voté pour lui8 ». Un sondage CSA « sortie des urnes », réalisé le 23 avril 1995, montre que 7 % des sympathisants de la CGT, 6 % de ceux de la CFDT (Confédération française démocratique du travail), 5 % de ceux de la CFTC (Confédération française des travailleurs chrétiens), 24 % de ceux de la CFE-CGC (Confédération française de l’encadrement-CGC) et 16 % de ceux de FO (Force ouvrière), ont voté Le Pen.

Fin 1995, la France est confrontée à une crise sociale, déclenchée contre le plan Juppé pour les retraites et la sécurité sociale. Le syllogisme est éclairant : la régression sociale, affirme Bruno Mégret, est la conséquence du « mondialisme et du libre-échangisme9 ». Le Front national se présente comme le seul parti réellement social, car ce combat rejoint le combat national. Au défilé du 1er mai 1996, parmi les banderoles, on peut lire : « Le social, c’est le FN ». Jean-Marie Le Pen enrôle la statue de Jeanne d’Arc dans la « protestation passionnée et souvent violente de ceux qui, pour vivre, devraient vendre leur force de travail à un prix souvent dérisoire ».

Le Front national se présente comme le seul parti réellement social, car ce combat rejoint le combat national.

Le social « n’est pas une carte à jouer, mais l’essence même du Front national », martèle-t-il lors d’un discours à la Mutualité le 20 février 1997. Un mois plus tard, lors du congrès de Strasbourg, le parti se dote d’un programme à forte empreinte sociale : création d’un revenu parental, salaire minimum augmenté, baisse des charges sociales, suppression des impôts sur le revenu, allégement des charges des entreprises. Mais un principe pérenne domine toujours : celui de la « préférence nationale » et donc de la priorité aux Français dans les attributions. Le FN préconise, par exemple, de taxer les entreprises employant des étrangers. Une vingtaine d’années plus tôt, un FN ultra-libéral se prononçait pour des privatisations dans les services publics ou pour la diminution des fonctionnaires et la suppression du salaire minimum interprofessionnel garanti (Smig). La sociologie électorale était alors radicalement différente. À partir de 1995, le FN se déplace, dans tous les sens du terme, s’ouvrant à des catégories de population qui drainent un électorat de gauche.

Au début des années 2000, le FN vit durablement les conséquences de la crise mégrétiste. Marine Le Pen et son équipe de Générations Le Pen œuvrent pour imposer une nouvelle orientation. En atteste la « convention présidentielle » de 2007, à Lille, qui affiche encore un peu plus le thème de l’« insécurité sociale », omniprésente dans certains territoires. Jean-Marie Le Pen fustige la « mondialisation menée à marche forcée », l’immigration et rend hommage à la lutte syndicale. Faisant référence à la tradition ouvrière du Nord-Pas-de-Calais, il célèbre les combats qui « arrachèrent de haute lutte les droits essentiels du travailleur au patron de droit divin d’alors » et se présente en défenseur des « petits, des obscurs, des sans-grades, des travailleurs pauvres ou retraités ». Sa directrice de campagne n’est autre que Marine Le Pen. Les années 2010 signifient clairement la concrétisation de cette stratégie.

Le FN de Marine Le Pen, un parti de gauche ?

La nouvelle présidente du FN donne le ton dès son premier discours : « À l’heure où la crise et la mondialisation font rage, quand tout s’effondre, il y a encore l’État. ‘À celui qui n’a plus rien, la patrie est son seul bien’ disait Jaurès en son temps, lui aussi trahi par la gauche du FMI et des beaux quartiers ! » Dans Pour que vive la France, préfiguration de son programme de la présidentielle de 2012, Marine Le Pen va jusqu’à s’appuyer sur une citation du Capital de Karl Marx. Elle entend présenter le FN comme un « nouveau » parti, puisant ses thématiques dans le terreau de la gauche traditionnelle, comme ses valeurs de justice sociale : « La gauche abandonna peu à peu la défense des classes populaires, des travailleurs, des exploités, oui j’ose le mot, pour la défense monomaniaque de l’exclu du Tiers-monde et du sans-papiers, tellement plus exotique et plus valorisante sur le plan intellectuel. Abandonner la défense du travailleur français, ce beauf raciste et inculte qui allait bientôt, et c’était une raison supplémentaire de l’abandonner, donner massivement ses voix au Front national, devint logique pour les grandes âmes de la gauche10 ».

Depuis la présidentielle de 2012, le profil de l’électeur frontiste n’a pas foncièrement évolué : il est peu diplômé, assez jeune. Ce sont des employés, artisans, commerçants et ouvriers qui, dans leur majorité, votent FN. En 1973, moins de 3 % d’ouvriers avaient déposé un bulletin de vote frontiste dans l’urne. Aujourd’hui, ils sont près d’un tiers à le faire. Non pas tant les ouvriers anciens électeurs de gauche, mais « de nouveaux ouvriers qui entrent dans le corps électoral11 », avec le renouvellement générationnel. Le recul du vote de gauche des ouvriers est donc porté « par de nouvelles cohortes ».

Aujourd’hui, le FN de Marine Le Pen s’affiche comme le représentant des catégories ouvrières et populaires : antilibéral, souverainiste, républicain et laïc. Certaines de ses villes laboratoires, comme Hénin-Beaumont, se situent dans des berceaux de l’électorat de gauche. Dans les territoires du Nord et de l’Est, les discours des représentants frontistes exploitent l’histoire et la mémoire politiques. Ils surfent sur la misère, reprennent les thèmes de l’insécurité sociale, de la lutte syndicale et critiquent le patronat. La menace du « mondialisme » est sans cesse brandie. Dorénavant, on ne voterait plus FN seulement pour sa thématique centrale anti-immigration, mais aussi pour des idées « sociales ». Le reniement de l’antisémitisme du père pourrait parachever cet édifice artificiel mis en place depuis plusieurs années.

Dans la perspective de la présidentielle de 2017, le FN a créé de multiples structures – think tank (Idées Nation), collectifs (Racine, Audace, Marianne, etc.), syndicats –, des cercles de réflexion embrassant un large éventail thématique (enseignement, culture, agriculture, etc.) présentés comme indépendants du parti. Parmi eux, l’emblématique Front syndical. À sa tête, un ancien juge aux prud’hommes de la CFDT, Dominique Bourse-Provence, conseiller régional de l’Île-de-France, chargé de rallier des cadres syndicaux. Cet ancien électeur socialiste met en avant l’arrivée de Marine Le Pen à la présidence du FN pour justifier son adhésion : « Elle a apporté de la cohérence sur le plan économique et social12 », alors que la « trahison » des dirigeants syndicalistes a « accompagné la désindustrialisation de la France ». Comme lui, d’anciens militants et militantes de gauche ou d’extrême gauche sont mis en avant. Ainsi du maire d’Hayange, Fabien Engelmann, ou de Valérie Laupies, membre du bureau politique du FN et conseillère municipale de Tarascon, qui fait partie du collectif Racine, un groupement d’enseignants « patriotes portant les valeurs républicaines ».

Le FN, premier parti de France ?

Le FN affiche une dynamique électorale sans précédent et, depuis les européennes de 2014, il décroche la première place aux premiers tours. Au second tour des régionales de 2015, il comptabilisait 6,8 millions de voix (200 000 voix de plus qu’à la présidentielle de 2012), engrangeant 240 conseillers régionaux de plus qu’en 2010. Son implantation gagne du terrain et le nombre de ses élus, représentants et adhérents, ne cesse d’augmenter. Pour autant, l’importance du FN à l’échelle du pays est à nuancer. En juillet 2015, il comptait 51 551 adhérents à jour de leur cotisation, bien moins que le Parti socialiste, Les Républicains ou le Parti communiste. Il existe aujourd’hui 11 mairies FN sur environ 36 700, moins de 360 conseillers régionaux sur 1757, environ 1540 conseillers municipaux sur 536 500 et une soixantaine de conseillers départementaux sur 4108. Ils sont 23 eurodéputés sur 74, 2 députés sur 577 et 2 sénateurs sur 348.]

Des ressorts idéologiques inchangés

Le FN, défenseur et protecteur des Français les plus défavorisés ? Sous couvert de justice sociale, la propagande frontiste puise toujours ses principaux ressorts idéologiques dans la « préférence nationale » – rebaptisée « priorité nationale » – et l’islamophobie pour dénoncer l’inégalité de traitement entre Français et étrangers, lesquels seraient avantagés, notamment pour les prestations sociales.

Sous couvert de justice sociale, la propagande frontiste puise toujours ses principaux ressorts idéologiques dans la « préférence nationale » – rebaptisée « priorité nationale » – et l’islamophobie.

Aujourd’hui, des électeurs de gauche se tournent vers le FN. Ils veulent que « ça change » et expriment leur rejet, avant tout, dans les élections intermédiaires (les municipales de 2014). Dans les villes FN, notamment à Hénin-Beaumont, nombre d’entre eux peuvent se montrer satisfaits de la politique de l’équipe municipale. Mais leurs remarques concernent, avant tout, l’évolution de leur ville quant à la propreté, l’organisation de fêtes et manifestations, ainsi que la proximité du maire et de son équipe avec les habitants. L’empreinte sociale n’est pas déterminante. Et ce vote de « gauche » ne s’est pas encore porté pour l’élection majeure, à savoir la présidentielle.



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1 Sur ce point, cf. Cécile Alduy, Stéphane Wahnich, Marine Le Pen prise aux mots. Décryptage du nouveau discours frontiste, Seuil, 2015.

2 « L’image du Front national », Institut de formation nationale, délégation générale, note interne, non datée.

3 Front national, n° 1, 7 novembre (sans mention de l’année), p. 1.

4 J.-M. Le Pen, cité dans « Le Front national rend publique une première liste de 104 candidats », Le Monde, 13/01/1978.

5 Damien Bariller et Franck Timmermans, 20 ans au Front. L’histoire vraie du Front national, Éditions nationales, 1993, p. 93.

6 Ibidem.

7 Nonna Mayer, Ces Français qui votent Le Pen, Flammarion, 2002, p. 35-36.

8 « Premier tour : surprise ! », National Hebdo, hors série, « 1995 l’année Le Pen », p. 18.

9 Bruno Mégret, « Comment réduire la fracture sociale ? », Les dossiers tricolores de National Hebdo, hors série, « Les hommes de Le Pen », non daté, p. 5.

10 Pour que vive la France, Jacques Grancher, 2012.

11 Florent Gougou, intervention à la Fondation Jean-Jaurès, « Le FN, parti des ouvriers ? », 25/02/2014.

12 « Cadre CFDT, il est chargé par le FN de lui ramener des syndicalistes », www.metronews.fr, 09/03/2015.


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1 réactions pour « La conversion sociale du FN, mythe ou réalité ? »

Fabrice Flipo
07 March 2017

Bonjour
Je crois que c'est une double erreur de penser que la "justice sociale" serait dans la redistribution et que ce serait incompatible avec le FN. La redistribution peut également être autoritaire : n'oublions pas que c'est Vichy qui "invente" la sécurité sociale et le national-socialisme qui redonne du travail à tous. Ces régimes autoritaires et conservateurs sont tout-à-fait compatibles avec une certaine forme de redistribution qui demeure limitée mais peut être de l'ordre de grandeur de politiques de gauche même "radicale" (JL Mélenchon propose un Smic à 1300 euros, Mme Merkel a fait voter un Smic, le FN pourrait le proposer s'il n'existait déjà). Le fait marquant est que cette redistribution ne s'accompagne pas de droits politiques, bien au contraire. Une idéologie conservatrice est d'abord dans un rapport d'affrontement avec un ennemi, de l'intérieur et de l'extérieur - ici : l'Islam. Des troupes motivées et loyales sont nécessaires pour faire face à cet ennemi, ce qui peut justifier des politiques de redistribution. Les idéologies conservatrices sont donc opportunistes, par rapport à la mondialisation : quand elle renforce la Nation, elles lui sont favorables, quand elles l'affaiblissent, elles s'y opposent. C'est la raison pour laquelle le néolibéralisme a pu être mis en oeuvre par des conservateurs. "Néolibéralisme" ne désigne d'ailleurs que la dimension économique : politiquement ce n'était pas du libéralisme mais bien du conservatisme. Voir mon petit livre "Les grandes idées politiques contemporaines" Bréal 2017 notamment.

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