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Dossier : Quel travail sans croissance ?

Travailler plus pour produire moins

Repair café - Photo credit: Ville de Villeneuve d'Ascq on Visualhunt / CC BY-NC-SA
Repair café - Photo credit: Ville de Villeneuve d'Ascq on Visualhunt / CC BY-NC-SA
« Moins de biens, plus de liens » : avec le concept de démarchandisation, l’économiste Bernard Perret rejoint à bien des égards ce leitmotiv écologiste. Mais il refuse d’opposer un travail marchand qui serait nécessairement aliénant à des activités hors marché épanouissantes. Et invite à travailler plus… pour sauver la planète !

L’affaiblissement tendanciel de la croissance économique et le chômage de masse annoncent-ils un monde où le temps consacré au travail serait réduit à la portion congrue ? L’on doit, pour répondre à la question, envisager plus globalement les transformations de l’activité humaine dans un contexte post-productiviste. Une société plus « verte » et plus conviviale ne sera pas moins laborieuse que la société industrielle. On pense bien sûr aux « emplois verts », liés au développement de technologies et modes de production plus respectueux de l’environnement (énergies nouvelles, isolation, chimie verte, voiture électrique, etc.). Mais on verra surtout se développer un ensemble varié d’activités de service liées à la maintenance, dans un sens très large, de la vie sociale et des écosystèmes. Dans le récit « standard » de l’écologie politique, la réponse à ces besoins sociaux potentiellement illimités – pour l’essentiel de nature immatérielle – s’inscrira dans une sphère d’échanges non monétaires dont le développement sera facilité par la réduction du temps de travail. Cette vision capture certainement un aspect important de notre futur, mais je propose ici un récit un peu différent, fondé sur le concept de « démarchandisation ».

Parmi les activités qui répondent à des besoins sociaux dont l’importance ne peut qu’augmenter (éducation, soins médicaux, culture, communication, agriculture biologique, construction, artisanat), un bon nombre impliquent des techniques élaborées et des formes complexes de division du travail. À cela s’ajoute un vaste domaine de tâches matérielles (réparation, maintenance, nettoyage, dépollution) dont l’essor accompagnera l’allongement de la durée de vie des produits et la généralisation du recyclage ; elles prendront d’autant plus de poids qu’elles sont peu automatisables. Certaines de ces activités ne relèveront probablement jamais de l’autoproduction, ni même d’un tiers-secteur associatif. Mais la démarchandisation, au sens où je l’entends ici, ne se réduit pas au développement d’une sphère d’activités hors marché : elle inclut également les processus par lesquels l’économie monétaire/marchande1, dans toutes ses composantes, incorpore progressivement des valeurs et des formes de rationalité qui ne relèvent pas de son concept de base.

La marchandisation en panne

D’un point de vue historique, le processus de marchandisation est lié à l’importance prise par les « marchandises », à savoir les biens – essentiellement des objets matériels – qui peuvent s’échanger facilement et dont la valeur d’usage ne dépend pas du contexte social. C’est cette décontextualisation que voulait souligner Adam Smith dans sa célèbre formule : « Ce n’est pas de la bienveillance du boucher, du brasseur ou du boulanger que nous attendons notre dîner. » Qui plus est, la production des biens matériels échangeables peut s’organiser rationnellement, avec toujours plus d’efficacité. La croissance que nous connaissons depuis des décennies est avant tout une croissance matérielle, liée aux gains de productivité dans la production des objets.

Bien que ce fait soit rarement mis en avant par les économistes, il est évident que le ralentissement de la croissance dans les pays riches s’explique en grande partie par l’épuisement de la dynamique d’objectivation des besoins par les marchandises. Au fur et à mesure de l’accroissement du niveau de vie, les besoins tendent à se concentrer dans des domaines où la production ne prend pas la forme d’objets échangeables. Il suffit pour s’en convaincre de regarder la liste des secteurs les plus créateurs d’emploi depuis une vingtaine d’années (santé, services aux personnes, hôtels-restaurants, conseil, nettoyage...). Or, à cause notamment de leur productivité stagnante ou faiblement croissante, ces services sont impropres à engendrer un cycle de croissance capitaliste auto-entretenu.

Nos besoins tendent à se concentrer dans des domaines où la production ne prend pas la forme d’objets échangeables.

Qui plus est, parallèlement à cet épuisement de la dynamique de croissance, la crise écologique révèle notre dépendance vis-à-vis de la biosphère et le caractère vital de biens environnementaux (ressources non renouvelables, écosystèmes, climat planétaire) qui n’ont pas vocation à entrer dans le circuit de l’échange monétaire. Il résulte de cette double crise que le développement de l’échange social ne peut plus prendre la forme d’une monétarisation des besoins. Nous sommes désormais contraints de sortir du paradigme monétaire et d’intégrer davantage de valeurs non monétisables dans l’échange social.

Une conscience diffuse de cette nécessité se répand peu à peu : l’avenir ne passe plus par la croissance marchande mais par la création de richesses d’un nouveau type. L’un des symptômes en est la vogue des nouveaux indicateurs de richesse (qualité de la vie, santé sociale, développement humain, etc.). Que l’argent ne fasse pas le bonheur n’est certes pas une découverte récente. Ce qui est plus nouveau, c’est la volonté de faire de cette maxime le principe d’une réorientation de l’action publique, comme cela semble être le cas dans certaines collectivités locales.

Il ne suffit cependant pas de mesurer d’autres formes de richesse pour en faire de véritables alternatives à la richesse monétaire. Le vrai défi est de les faire circuler à travers de nouvelles pratiques d’échange et, in fine, de les reconnaître comme des contreparties du travail ou de l’activité. Si un nombre croissant de pratiques sociales s’inscrivent implicitement dans une telle logique, bien peu sont prêts à considérer qu’un gain de richesse non monétaire compensera une baisse de revenu.

Échanger sans argent

Illustration de ce qui précède, de nouvelles formes d’échange non monétaire foisonnent, surtout depuis la crise de 2008 : troc, covoiturage, autoproduction communautaire (habitat, alimentation), logiciels libres, diffusion gratuite de biens culturels, mutualisation de l’habitat (colocation, couch surfing)… Le concept émergent d’économie collaborative s’applique à une partie de ces pratiques. La création de monnaies parallèles est une autre forme d’alternative à l’échange marchand, qui revient à re-contextualiser celui-ci dans un cadre micro-social. Le bénévolat, enfin, connaît un réel dynamisme, même si la situation du secteur associatif est contrastée.

Ces réalités sont certes trop disparates pour qu’on puisse évaluer globalement leur impact. Elles n’en sont pas moins porteuses d’une logique de transformation du système économique et de la société, que l’on peut résumer en trois points : réduire la demande de marchandises en s’organisant de manière pragmatique pour répondre aux besoins ; privilégier la mutualisation, les circuits courts et l’autoproduction ; réinscrire l’activité et l’échange dans leur contexte social pour faire de ce dernier une source de valeur. Si l’on est fondé à parler de démarchandisation pour qualifier globalement ces différents mécanismes, c’est que la logique qui les sous-tend est à l’exact opposé de celle qui préside à la marchandisation – le recours systématique aux artefacts décontextualisés. Deux principes d’efficacité s’opposent : dans le monde industriel, le détour par les outils et objets techniques (de pair avec l’allongement des circuits d’échanges et la complexification de la division du travail) permet d’augmenter la productivité ; dans le monde post-productiviste, en revanche, les gains d’efficacité résultent souvent de la mobilisation du contexte social. Dans certains cas, il s’agit seulement de faciliter l’échange en réduisant les coûts de transaction, mais, dans d’autres, l’activation des liens sociaux produit un nouveau type de valeur qui accroît le bien-être. Non mesurables, non programmables, ces contributions sont pourtant bien réelles : un covoiturage qui se passe bien, ce n’est pas simplement un déplacement peu onéreux, c’est une rencontre, un moment d’échange qui a valeur en soi. C’est aussi un moyen de réduire les nuisances liées aux transports.

Dans le monde post-productiviste, les gains d’efficacité résultent souvent de la mobilisation du contexte social.

Le travail : du sens et des liens

On trouve souvent exprimée l’idée que la diminution du temps travaillé n’est pas seulement une manière de partager l’emploi en l’absence de croissance, mais une nouvelle étape du projet moderne d’émancipation de l’individu. La pensée d’André Gorz, emblématique de cette approche, repose sur l’opposition frontale entre le travail économique, forcément aliénant, et les activités – loisirs, autoproduction, engagement politique – dans lesquelles l’être humain exprime librement sa subjectivité. Cette vision dualiste de l’activité humaine – hétéronomie des rapports économiques versus autonomie des personnes dans les rapports sociaux hors marché – ne résiste guère à l’analyse. Comme l’avait bien vu Cornélius Castoriadis, autre penseur de l’autonomie, toute socialisation est hétéronome : « L’individu social ne pousse pas comme une plante, mais est créé-fabriqué par la société, et cela toujours moyennant une rupture violente de ce que sont l’état premier de la psyché et ses exigences. Et de cela toujours une institution sociale, sous une forme ou sous une autre, aura la charge2. » Il résulte de cette observation qu’une partie de ce qui fait la négativité du travail – effort, soumission à des règles imposées, hétéronomie des fins poursuivies – est inhérente à l’activité sociale organisée, qu’elle soit rémunérée ou non, et que la socialisation est à ce prix.

Une partie de ce qui fait la négativité du travail – effort, soumission à des règles imposées – est inhérente à l’activité sociale organisée, rémunérée ou non.

Ce qui ne veut pas dire que le vécu du travail ne soit pas un enjeu. C’est d’abord un enjeu de reconnaissance et de sens. Il s’agit de rompre avec l’approche utilitariste qui voit dans le travail un temps perdu pour le bonheur, sacrifié à la production en vue de la consommation. La valeur du temps travaillé n’est nullement réductible à ce qu’il permet de réaliser et d’acheter. C’est aussi un temps de rencontres, de socialisation, de formation, d’expression de soi et de plaisir. Inversement, l’accroissement du temps libre n’est pas un progrès s’il se paie d’un surcroît de flexibilité subie, d’une pénibilité accrue et d’une désorganisation des rythmes sociaux. Au-delà de l’objectif toujours actuel d’améliorer les conditions de travail, des sujets comme le stress social, le pouvoir de négocier l’organisation et les horaires, le caractère qualifiant des tâches, le partage des responsabilités et la possibilité offerte à chacun de participer à la définition des objectifs, etc., sont appelés à prendre davantage d’importance dans une société privée de croissance.

Transformer la logique économique

La problématique de la qualité du travail est-elle liée à celle de la démarchandisation ? Il n’existe pas de correspondance automatique entre la nature objective d’une tâche, la manière dont elle est organisée par la société et le sens que lui confère un individu particulier. Le vécu du travail semble résister à toute généralisation, tant sont diverses les situations et les manières de les assumer (y compris, pour un même individu, selon les périodes de son existence). Il n’en demeure pas moins que le desserrement des contraintes marchandes et la pluralisation des logiques d’échange créent un contexte favorable à l’enrichissement du sens du travail.

Les pratiques évoquées plus haut au titre de la démarchandisation relèvent principalement du développement d’une sphère d’échange social distincte de la sphère économique. Or, bien que la concurrence et le profit paraissent régner sans partage, il existe au sein de l’économie capitaliste des tendances qui relèvent d’une autre forme de démarchandisation. Le phénomène qui retient le plus l’attention des économistes et des sociologues est l’importance prise par les réseaux comme facteurs de production. Le succès, il y a quelques années, de la théorie du « capital social »3 témoigne d’une prise de conscience du fait que la richesse économique réside pour une part croissante dans la qualité des rapports sociaux. Plus récemment, des phénomènes comme le crowdfunding et le crowdsourcing illustrent de nouvelles manières de mobiliser des relations sociales dans le développement d’activités lucratives. On peut y voir, certes, une subordination du social à l’économique, mais cela ne dit pas tout. Les rapports humains ont leur propre dynamique, rétive à toute forme d’instrumentalisation, et l’invention collective de nouvelles règles du jeu pour produire ensemble modifie structurellement la réalité sociale du travail. Un autre exemple bien connu, à mi-chemin entre la transformation de l’économie marchande et le développement de la sphère non monétaire, est l’économie sociale et solidaire4. Elle se définit elle-même par son projet d’hybridation des logiques : mobiliser des ressources économiques et non économiques pour produire de la cohésion sociale dans le cadre de l’économie de marché.

La richesse économique réside pour une part croissante dans la qualité des rapports sociaux.

Il n’est pas sans intérêt d’observer que l’impératif écologique suscite des innovations qui aboutissent par d’autres voies au même résultat, à savoir une altération de la logique marchande. L’économie de fonctionnalité5 permet d’illustrer ce point. Sa vertu première, au plan écologique, est de réduire la production matérielle au profit de nouveaux services (gestion, maintenance). Pour ce qui nous occupe ici, le point d’intérêt est que cela passe par une complexification du contenu de l’échange marchand. La capacité de l’économie de fonctionnalité à desserrer les contraintes écologiques procède du fait qu’elle apporte des solutions globales à des problématiques complexes, sans se limiter à la fourniture d’un service. Elle doit pour cela inclure dans sa réponse la réduction des « externalités négatives » (nuisances et impacts environnementaux) liées à la satisfaction d’un besoin, ainsi que l’utilisation de ce que l’économiste Christian du Tertre appelle des « externalités ressources6 » – à savoir des ressources sociales habituellement non valorisées dans le processus économique, telles que les diverses compétences mises en jeu par les utilisateurs d’un service. Prenons l’exemple du Vélib parisien : il est bien connu que l’usager ne paie pas le coût complet et que l’équilibre financier est assuré par les recettes publicitaires. Cette subvention se justifie par les externalités positives d’une mobilité « douce » : baisse du trafic automobile, de la pollution, etc. Quand on regarde maintenant du côté des « facteurs de production » mobilisés par le système, on constate que le civisme des usagers est une ressource cruciale – et d’ailleurs problématique – pour réduire le vandalisme et les coûts de maintenance. Au total, l’analyse révèle un modèle économique complexe dans lequel les flux monétaires ne reflètent qu’une partie des valeurs produites et des ressources consommées. On a là une autre illustration de ce que signifie la démarchandisation : la prise en compte de ressources et de bénéfices non monétisables dans l’équilibre global d’un échange économique.

Travailler mieux pour sauver la planète

Si le travail productif a été placé au cœur du système social, c’est qu’il est apparu à un moment donné de l’histoire comme une ressource universelle, le moyen de créer n’importe quel bien. Or le contexte où a émergé cette conception de la richesse a radicalement changé. Les ressources qui risquent de nous faire défaut, et qui compteront donc le plus à l’avenir, sont l’énergie, les matières premières et les écosystèmes. Tôt ou tard, l’objectif premier sera d’économiser ces ressources et de maximiser leur productivité. Cela conduira logiquement à concevoir d’une autre manière l’efficacité du travail, en tenant compte de son impact sur la nature. Or cette vision élargie de l’efficacité est porteuse d’un enrichissement du sens du travail. On en a une illustration avec l’agriculture biologique : pour éviter d’utiliser des engrais chimiques et des pesticides, il faut passer plus de temps à travailler la terre, apprendre à connaître les processus naturels, choisir les cultures et en prendre soin. Cela a un coût, mais c’est aussi une manière de rendre le travail plus qualifiant, plus sain (au sens de la protection de la santé) et plus sensé.

En vertu de la même logique d’enrichissement, les démarches participatives d’éco-responsabilité donnent l’occasion de s’interroger sur l’organisation et le sens du travail au regard d’un enjeu pour lequel tout le monde est concerné. Si l’écologie est bénéfique pour la qualité du travail, c’est qu’elle a les vertus d’un retour au réel. Elle contraint l’économie à redevenir une affaire concrète, centrée sur les nécessités de la vie humaine : se nourrir, se chauffer, se déplacer, prendre soin des corps et de la nature. C’est une chance pour le travail, qui a d’autant plus d’intérêt qu’il produit des choses utiles et reliées à ce qui compte dans notre vie.

Parler ici de démarchandisation, c’est souligner une fois de plus où se situe la rupture avec le modèle de développement issu de la révolution industrielle. Le progrès de la civilisation ne passe plus par l’intensification des flux de valeurs monnayables (l’échange de marchandises), mais par l’établissement de relations plus harmonieuses avec les autres et avec la nature à travers l’ensemble de nos activités. Cette mise en perspective fournit une clef indispensable pour penser l’avenir du travail.



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1 En toute rigueur, il conviendrait de distinguer le monétaire et le marchand. Cela nous entraînerait trop loin dans le cadre de ce texte sans changer l’argument central.

2 L’institution imaginaire de la société, Points Seuil, 1999 [1975], p. 453.

3 Cf. notamment les travaux du sociologue américain Robert Putnam.

4 Sur ce sujet, lire l’article de Philippe Frémeaux « L’économie sociale et solidaire, une réponse à la crise ? » dans ce dossier.

5 L’économie de fonctionnalité entend remplacer la vente de biens par celle de services équivalents, tout en étant moins consommatrice d’énergie et en offrant une plus-value sociale (c’est le cas notamment des Amap, qui permettent d’obtenir des produits agricoles de qualité, de créer des liens avec le producteur, etc.).

6 In Jacques Theys, Christian du Tertre et Félix Rauschmayer, Le développement durable, la deuxième étape, L’Aube, 2010, p. 98.


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