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Dossier : Quel travail sans croissance ?

Survivre en temps de crise. Une perspective historique

Mont-de-Piété à Paris, rue des Blancs-Manteaux©LPLT/Wikimédia commons/CC
Mont-de-Piété à Paris, rue des Blancs-Manteaux©LPLT/Wikimédia commons/CC
Comment les plus pauvres survivent-ils ? Les stratégies déployées au XVIIIe siècle (multiplication des activités, développement des réseaux sociaux et épargne) témoignent d’une volonté farouche de s’en sortir sans dépendre de la charité d’autrui, stigmatisante et aléatoire. Un état d’esprit vivace en temps de crise.

Dans l’Europe préindustrielle, tous ceux qui n’ont que leur travail pour vivre – telle est alors la définition du pauvre – multiplient les stratégies économiques pour traverser les crises qui peuvent les frapper, comme la maladie, le chômage ou la cherté des denrées1. Dans un monde alors sans filet de sécurité, hormis une charité jamais suffisante, chacun essaie de minimiser les risques de se retrouver sans soutien, sans travail, sans crédit en développant quatre grands ensembles de stratégies : tous pratiquent la polyactivité, s’attachent à être membre de réseaux sociaux qui pourront les aider en cas de besoin, développent de complexes systèmes d’épargne et des économies d’échelle.

Être multitâches

La polyactivité joue sur un double registre : des activités légales et/ou illégales et la possibilité – ou non – que ces activités développent des capacités entrepreneuriales. Les habitants des villes cherchent à travailler dans l’artisanat à domicile, les services en tous genres, la vente ou la revente de petits produits. La famille tire profit du formel et de l’informel pour diversifier sa clientèle, les espaces occupés et ses rentrées d’argent. Tous bénéficient de l’abondance de travail occasionnel qu’apporte la ville. Dans les campagnes, l’industrie à domicile, le service et la production agricole sont les pôles grâce auxquels les familles divisent les risques.

L’exemple d’une économie populaire réussie permet de comprendre l’amplitude des stratégies que chacun aimerait mettre en œuvre. Ernst Jacob Vayhinger, un tisserand de laine vivant dans une petite ville au sud-ouest de l’Allemagne, a tenu la chronique, entre 1756 et 1784, de ses activités et des multiples crises qu’il a traversées. Il se marie à 25 ans et reçoit en cadeau un métier à tisser. Il développe son activité, s’endette dès qu’il le peut pour acheter d’autres métiers ainsi qu’une partie de la maison familiale pour les y installer. Parallèlement, il loue des lopins de terre appartenant à la ville : la culture lui permet de devenir un maraîcher actif et de cultiver un peu d’orge et de pommes de terre. Les années fastes, il commercialise les surplus. Les mauvaises, les quelques récoltes obtenues rendent sa famille moins dépendante de la cherté des denrées. Enfin, il élève des oiseaux : des pigeons, puis, dans les difficiles années de 1764 et 1766, des canaris. Grâce à cette entrée dans le marché du luxe – la bourgeoisie européenne s’est entichée de fleurs et d’oiseaux exotiques – il s’assure des rentrées d’argent les années de famine : en 1772, la vente d’oiseaux représente près du quart des gains de l’année. Cette habileté à jouer des différents marchés lui permet, quelques années plus tard, d’acheter à crédit le bas de sa maison. Il la loue jusqu’à ce qu’un incendie la ravage en 1782. Avant de mourir, il essaie d’assainir sa succession en apurant dettes et crédits.

Ceux qui n’ont pas les moyens d’accéder à une grande diversité de marchés, faute de capital ou d’un investissement de départ, entrent dans ceux de la revente. De fait, avant l’arrivée de la confection bon marché au XXe siècle, l’économie du vêtement repose sur le réemploi et non sur la nouveauté. Les habits sont rares et précieux. Ils font vivre une armée de tailleurs qui les adaptent à leurs propriétaires successifs jusqu’à usure complète. Jamais jetés, ils sont vendus, loués, offerts ou mis en gage si besoin. Ils animent ainsi un commerce très important.

L’économie du vêtement repose sur le réemploi et non la nouveauté. Jamais jetés, les habits sont vendus, loués, offerts ou mis en gage si besoin.

Les femmes sont au cœur de cette petite économie où le vêtement circule comme de l’argent. Car, bien qu’étant sous la tutelle de leur mari et malgré les régulations qui restreignent leurs droits, elles doivent gérer les dépenses familiales, jongler entre des besoins fréquents d’argent et des rentrées irrégulières, avec des budgets qu’elles contrôlent rarement. Ainsi, leurs rôles sociaux, dans une économie où les institutions financières sont très peu développées et dans un environnement juridique qui les marginalise, expliquent pourquoi elles animent, depuis le Moyen-Âge, des circuits de vente et de revente d’habits usagés. Nombre de femmes survivent aussi en utilisant leur savoir-faire de couturière pour retravailler les vêtements d’occasion. Elles le font à la demande, pour des fripiers ou comme activité annexe pour gagner quelques sous, vendant les pièces produites (généralement des vêtements d’enfants) par les rues et les marchés.

Exclus du marché

Mais ces possibilités se ferment progressivement dès le XVIIIe siècle. Trois phénomènes sont responsables de l’exclusion du marché des plus pauvres : la lutte des marchands établis, qui veulent se débarrasser de ce petit commerce concurrent ; l’État, qui saisit toutes les possibilités pour lever de nouvelles taxes ; et, au XIXe siècle, l’apparition de nouvelles normes d’hygiène qui changent le regard sur l’occasion et font peser sur les vêtements qui circulent ainsi le soupçon de la vermine et du choléra. L’instauration des patentes2 est le premier coup porté aux nombreuses femmes qui vivent de la retaille des vêtements.

Un procès illustre très bien ces transformations. Il concerne deux sœurs, Marie-Denise Toutain, épouse d’un charpentier, et Antoinette Toutain. Elles sont toutes deux inculpées pour avoir vendu sans patente des vêtements à la foire de Meaux, en mai 1796. Le jugement met en évidence la volonté de les exclure du marché et le lien qu’elles entretiennent avec le commerce officiel car, outre les menus vêtements d’enfants qu’elles ont confectionnés dans de vieux habits, elles vendent des marchandises que leur a confiées une fripière. Devant la justice, elles invoquent leur pauvreté, leurs charges de famille et le fait que leur commerce est si modeste qu’elles ne pensaient pas devoir payer patente. L’avocat commis à les défendre conclut sa plaidoirie en soulignant combien ces pratiques sont répandues : « Les femmes Moreau et fille Toutain sont comme beaucoup de citoyennes de toutes les communes de la République qui, comme elles, fabriquent des hardes d’enfants avec de vieux linges qu’elles se procurent, hors d’état de payer la moindre patente, le fonds de commerce de la plupart d’entre elles n’équivalant pas au prix de la plus petite patente3… ». Ces femmes sont victimes de la volonté du législateur de réglementer le commerce et, plus encore, de la lutte entre commerçants. Ce phénomène d’exclusion est d’ailleurs général et Louis Sébastien Mercier dénonce l’augmentation des saisies pour réglementer ces multiples entrées dans le marché, alors que, dans la France du XVIIIe siècle, tout le monde était plus ou moins marchand : « Rien de plus fréquent, et rien qui déshonore plus notre législation. On voit souvent un commissaire avec des huissiers, courant après un vendeur de hardes, ou après un petit quincaillier qui promène une boutique portative. (…) On dépouille publiquement une femme qui porte sur son dos et sur sa tête une quarantaine de paires de culottes. On saisit ses nippes au nom de la majestueuse communauté des fripiers (…) on arrête un homme en veste qui porte quelque chose enveloppé sous son manteau. Que saisit-on ? Des souliers neufs que le malheureux avait cachés dans un torchon. Les souliers sont enlevés par ordonnance, cette vente devenant attentatoire à la cordonnerie parisienne4. »

Activer son réseau et épargner

À côté de la polyactivité, les classes populaires s’attachent à développer des réseaux sociaux horizontaux et verticaux capables de les aider à traverser les périodes difficiles. Les premiers regroupent les parents, les voisins, les amis et les égaux dans l’activité. Les seconds les élites auxquelles citadins et paysans sont liés par le travail ou le pouvoir. Mais qu’elles soient verticales ou horizontales, toutes les relations sociales sont traversées par la dette. Le crédit se contracte d’abord dans les cercles de relations interpersonnelles qui entourent les individus. Puis il s’en dégage progressivement et s’inscrit dans une relation plus nettement économique et dépersonnalisée quand les personnes sont obligées de se tourner vers des usuriers.

Parallèlement, les citadins pauvres ont su développer de complexes stratégies d’épargne. L’une, réservée aux hommes, renvoie au dernier ensemble de solidarités horizontales : les confraternités et corporations qui ont toutes une volonté d’aider leurs membres pauvres. Mais la plupart sont de vraies stratégies de placements financiers : les toutes petites gens, pour éviter de finir leurs jours à l’hôpital, investissent leurs modestes épargnes dans ces mêmes établissements, attirés par les gros revenus et l’apparente sécurité de ces placements. Le recteur de l’Hôtel-Dieu de Marseille décrit ainsi à l’intendant en 1762 les créanciers de son établissement : « Le plus grand nombre de ces créanciers sont des gens de travail, artisans, gens de mer, domestiques, petits bourgeois, orphelins, vieillards ; tous sont venus à l’Hôtel-Dieu comme dans un temple sacré y déposer la sueur d’un long et pénible travail pour en retirer un très modique intérêt qui les aida à sustenter leur famille et à finir leurs jours sans être à charge aux œuvres pies5. » L’analyse des souscripteurs des monts-de-piété montre que le menu peuple n’hésite pas non plus à y investir ses économies.

Le crédit est une forme d’épargne : se prêter mutuellement de l’argent, outre créer des solidarités, évite de dépenser.

Le crédit est également une forme d’épargne : se prêter mutuellement de l’argent, outre créer des solidarités, évite de dépenser. En France, on croise parfois dans les archives des femmes comme Françoise Moreau, ancienne servante à Lyon, qui écrit de Grenoble en mars 1743 à une compatriote blanchisseuse pour lui demander, entre autres, de récupérer la créance de 21 sols qu’elle a chez une raccommodeuse de bas de la rue Bellecordière, car « elle a bien besoin d’argent ». Petit prêt que la Dauphinoise n’a pas recouvré en quittant Lyon et que seul le besoin lui fait maintenant réclamer. Solidarité pour Françoise Moreau mais sans doute activité annexe pour Marguerite Lambert, une blanchisseuse du quai des Célestins, qui laisse pour 153 livres de mobilier et d’effets dans la chambre où elle loge mais possède des créances pour 2162 livres. Elle avait prêté à différentes personnes dont une fois plus de 1000 livres. Se révèle là toute une activité de crédit minuscule à l’intérieur des quartiers dont les femmes sont de grandes actrices. Et les frontières sont particulièrement poreuses entre solidarité, épargne et entrée dans les marchés de la finance informelle.

L’acquisition d’objets de luxe est également à cheval entre l’épargne et l’entrée dans le marché de l’argent. À Paris, les inventaires après décès du XVIIIe siècle enregistrent un accroissement spectaculaire des montres et des objets de mode tout au long du siècle. Les bijoux suivent la même tendance. Or, ces montres de prix sont les objets de prédilection que les classes populaires déposent au mont-de-piété. Louis Sébastien Mercier a assisté à l’ouverture de celui de Paris en décembre 1777 et l’analyse de ses dépôts confirme ses dires : « Rien ne prouve mieux le besoin que la capitale avait de ce lombard, que l’affluence intarissable des demandeurs. On raconte des choses si singulières, si incroyables, que je n’ose les exposer ici avant d’avoir pris des informations plus particulières qui m’autorisent à les garantir. On parle de quarante tonnes remplies de montres d’or, pour exprimer sans doute la quantité prodigieuse qu’on y en a porté. Ce que je sais, c’est que j’ai vu sur les lieux soixante à quatre-vingt (sic) personnes, qui attendant leur tour, venaient faire chacune un emprunt qui n’excédait pas six livres. L’un portait ses chemises ; celui-ci un meuble ; celui-là un débris d’armoire ; l’autre ses boucles de souliers, un vieux tableau, un mauvais habit, etc. On dit que cette foule se renouvelle presque tous les jours, et cela donne une idée non équivoque de la disette extrême où sont plongés le plus grand nombre des habitants6. »

Toutes les familles populaires qui le peuvent pratiquent les économies d’échelle en louant des lits et en accueillant chez elles des étrangers.

Enfin, toutes les familles populaires qui le peuvent pratiquent les économies d’échelle en louant des lits et en accueillant chez elles des étrangers. La sous-location de pièces ou de lits est très répandue. L’on note partout l’extrême mobilité des locataires : beaucoup déménagent pour des logements moins chers devant l’impossibilité de payer. De fait, le retard dans le paiement des loyers est la principale cause de l’endettement et ces retards, avec saisie ou menace de saisie, jettent sur les routes individus et familles. Évaluer le nombre de termes de retard moyen permet d’ailleurs une mesure de la pauvreté citadine et de ses fluctuations.

Refuser la misère

L’ensemble de ces stratégies renvoie à la manière dont les classes populaires cherchent à apprivoiser le futur, à se prémunir contre les crises qu’elles ne manqueront pas de rencontrer et à les traverser au mieux. Mais quand elles sont plus durement frappées que prévu, quand elles ont utilisé leurs épargnes, que le crédit manque et qu’il s’avère impossible de trouver du travail en quantité suffisante, que font-elles ? Quelques sources, dont des lettres de demande d’assistance aux institutions, renseignent sur ces choix dramatiques.

Les familles opèrent notamment des changements alimentaires qu’il est difficile d’approcher et qui fragilisent la santé des individus, même si les rares livres de comptes d’artisans de bouche conservés montrent l’ampleur du crédit à la consommation, en particulier auprès des boulangers. Les familles jouent également sur leur taille : elles recourent à l’abandon d’un ou plusieurs enfants, les confient temporairement à des proches si elles le peuvent, ou à l’hôpital – chaque région a ses habitudes en la matière – sachant qu’ils y seront recueillis et mis en apprentissage, ce qui, s’ils survivent, leur ouvrira un futur professionnel meilleur… D’autres les envoient mendier ou les confient à des entrepreneurs de main-d’œuvre infantile, comme les ramoneurs. Dans les régions pauvres, on se débarrasse davantage des enfants entre 7 et 12 ans, car les nourrir coûte cher et ils ne représentent pas encore une force de travail. Néanmoins, ces pratiques, tout comme la migration, sont des formes de destruction de la famille : celle-ci se prive non seulement de certains de ses membres mais aussi de sa descendance, quand les enfants sont mis, ou se mettent, à l’écart.

Pour éviter d’être enfermées et continuer une activité, de nombreuses femmes refusent les secours.

Les dossiers des établissements de charité destinés à accueillir les indigents mettent en lumière les activités féminines les plus fréquentes – les femmes constituant l’immense majorité des pauvres. Pour éviter d’être enfermées et continuer une activité, nombreuses sont celles qui refusent les secours. Certaines se prostituent, beaucoup mendient. Le plus grand nombre exerce de petits métiers : les unes colportent denrées alimentaires et journaux (des villes comme Paris ou Madrid réservent la distribution d’imprimés à leurs pauvres) ; les autres se font maîtresses d’école, gardent des enfants, des malades et des personnes âgées, lavent le linge ; certaines travaillent en chambre, cousent des habits ou font des gants ; d’autres portent de l’eau… Quelques-unes tiennent même des boutiques et des débits de boisson. Toutes ces données, dont plusieurs concernent des personnes déjà âgées, témoignent du refus des plus démunis d’entrer dans les institutions d’assistance et de leur capacité à s’insérer dans le marché, lieu de sociabilité autant que de petits gains.

Aujourd’hui, le succès des divers sites de ventes aux enchères ou de revente sur internet témoigne d’une réappropriation du marché par les particuliers.

Aujourd’hui, ce désir de reconquête du marché est de plus en plus visible. Il se traduit notamment par la multiplication, sur tout le territoire, des vide-greniers. Comme sous l’Ancien Régime, ce mouvement est vigoureusement combattu par les professionnels auxquels ils font une modeste concurrence. Le succès des divers sites de vente aux enchères ou de revente sur internet témoigne d’une autre modalité de réappropriation du marché par les particuliers. Le développement du microcrédit, qui met à disposition les capitaux indispensables pour créer une petite activité entrepreneuriale et marchande, est un autre signe de ce réinvestissement. Enfin, le régime de l’auto-entreprise qui, malgré ses faiblesses et les craintes qu’il inspire, a permis de créer depuis le 1er janvier 2009 plus d’un million de micro-entreprises (dont une partie non négligeable par des gens en situation d’exclusion sociale et vivant des minimas sociaux) démontre que de nombreuses personnes, malgré leur marginalisation et la faiblesse de leurs moyens, ont la volonté et les capacités de s’en sortir.



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1 Pour approfondir cet article, cf. notamment L. Fontaine, L’économie morale. Pauvreté, crédit et confiance dans l’Europe préindustrielle, Gallimard, 2008 et Le marché. Histoire d’une conquête sociale, Gallimard (à paraître en janvier 2014).

2 Impôt auquel étaient assujetties les personnes exerçant certaines professions (commerce, industrie et quelques professions libérales) [NDLR].

3 Archives nationales BB 18822 Justice Seine-et-Marne.

4 Louis Sébastien Mercier, Tableau de Paris (Jean-Claude Bonnet, dir.), 2 tomes, Mercure de France, 1994 [1781-1789], vol. 2, chap. DLXXVI, pp. 143-144.

5 Gaston Valran, Misère et charité en Provence au XVIIIe siècle. Essai d’histoire sociale, A. Rousseau, 1899, p. 205.

6 Louis Sébastien Mercier, Tableau de Paris, op. cit., t. 1, chap. CCLXII, pp. 662-664.


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