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Dès cet été, le dimanche 16 août, la nouvelle loi sur le travail dominical est entrée en vigueur dans 569 communes et zones touristiques, compliquant une législation préexistante déjà assez mal appliquée. Mais les débats ne sont pas clos concernant la définition des zones concernées, et les organisations syndicales tentent encore d'organiser la défense des salariés. Ce texte, emblématique de la politique menée en France depuis 2007, appelle deux types de commentaires.
Sur le plan social, les risques sont grands de voir se généraliser la pratique des ouvertures de grands magasins et centres commerciaux où l'on vient en famille, entraînant une banalisation des statuts et donc des rémunérations. Ceux qui acceptent aujourd'hui de travailler le dimanche pour un salaire double n'y auront sans doute plus droit d'ici peu! Les injustices vont croître aussi entre les acteurs économiques avec la définition des «périmètres d'usage de consommation exceptionnelle» (les Lyonnais ont la chance d'y échapper…) : les commerces dans le voisinage de ces zones subiront naturellement une baisse d'activité. Ce n'est que la poursuite de l'effritement du droit du travail dénoncé dans Projet en janvier 2008 (n 302), par Emmanuel Dockès. Mais au-delà des arguments juridiques, sociaux et économiques, il s'agit d'un principe essentiel, qui n'est pas seulement celui du repos compensateur, mais celui du congé. « Le repos hebdomadaire consacre la dignité du travailleur à être autre chose qu'un travailleur, son droit une fois par semaine de se reposer, mais aussi de voir ses amis, de prier Dieu s'il le désire, de se distraire » (J. Julliard, dans Le Nouvel Observateur en décembre 2008). Sans oublier de profiter de la nature, de la culture, et d'enrichir la vie associative et militante. En tout cas, les dimanches ne sont pas faits pour nous pousser à consommer plus. Surtout, notre société compte bien assez de gens obligés de travailler ce jour-là pour notre bien-être ou notre sécurité (hôpitaux et autres services publics) ou pour notre plaisir (restaurants et musées…) pour que d'autres ne subissent pas, eux aussi, une désorganisation de leur équilibre de vie que l'on oublie mais dont les conséquences sont lourdes en termes de désocialisation.
20 août 2009