Une revue bimestrielle, exigeante et accessible, au croisement entre le monde de la recherche et les associations de terrain.
Projet- Quelle était l’ambition de «La politique une bonne nouvelle » en organisant cette journée du 9 avril ?
Olivier de Fontmagne - Elle était double : à la fois orientée vers l’Europe, véritable enjeu pour cette génération, et vers la formation. Nous voulions poursuivre le travail d’éveil à la politique entrepris dans le cadre des sessions qui ont lieu tous les deux ans à La Baume-les-Aix. Le referendum offrait l’occasion d’un débat « in life ». J’ai rencontré quelques hésitations au sein de l’équipe d’animation quand j’ai proposé de réserver la plus grande salle du Palais du Luxembourg ! Mais mes expériences antérieures me donnaient à penser que cette génération, en particulier des étudiants ou des jeunes actifs qui sillonnent l’Europe et le monde - physiquement ou virtuellement, membres de mouvements sociaux et chrétiens, sont branchés sur la thématique européenne. Et, de fait, nous avons refusé 200 demandes d’inscription, faute de place.
Projet - Proposer des formations, est-ce vraiment le meilleur moyen de susciter un intérêt pour la politique ?
Olivier de Fontmagne - Il faut s’entendre sur ce que recouvrent ces mots. La formation de cette génération à la politique comporte une dimension nécessaire d’enseignement. Mais elle ne peut se limiter à cela ! On ne bouscule pas les préjugés, les multiples obstacles qui entravent l’intérêt et l’action à l’égard de la politique par des leçons magistrales, ni même par des témoins, aussi prestigieux soient-ils… Cette génération a besoin de vérifier, d’expérimenter par elle-même. Elle se méfie des slogans et des idéologies. Ainsi, durant le débat au Palais du Luxembourg, les participants n’ont pas voulu des propos séducteurs des intervenants : partisan socialiste du « Non » réprouvant la soi-disant ouverture du Traité au mariage gay, partisan UDF du « Oui » amalgamant les « Non » lépenistes avec ceux des fabiusiens. En revanche, ces adultes jeunes ont besoin d’échanges, de confrontations, de débats à la fois organisés et informels. Entre eux, à travers ces rencontres, ils se communiquent envie, désir, plaisir d’agir ensemble. Et pour ce faire, il faut qu’ils se retrouvent assez nombreux pour brasser les idées, et que s’opèrent une « auto-émulation ». Les témoignages qu’ils se portent les uns aux autres sont souvent plus signifiants et performants que le recours à des vedettes ou à des spécialistes de la politique.
Projet - Vous accordez beaucoup de place aux traits que l’on dit propres aux jeunes générations : « ressenti », convivialité, recherche du consensus. Comment aider aussi à la formation du jugement par rapport aux arguments des partisans du Oui et du Non ?
Olivier de Fontmagne - L’un n’exclut pas l’autre, au contraire ! Chaque atelier (Démocratie européenne, Europe sociale et économique, politique étrangère et de défense) disposait d’un dossier avec des avis de partisans du Oui et du Non - de la gauche à la droite, ainsi que des extraits de la Constitution. Des doctorants en science politique étaient présents pour donner des éclaircissements. D’ailleurs, les participants ont parlé de cette journée en des termes qui allient émulation et exigence : « Je n’aurais pas imaginé que politique et bonne nouvelle puissent s’accorder. J’en suis maintenant persuadée » ; « Merci pour cette journée passionnante, hautement professionnelle, et très engageante pour l’action ». Toute notre visée est dite en ces quelques mots.