Une revue bimestrielle, exigeante et accessible, au croisement entre le monde de la recherche et les associations de terrain.
Une démocratie troublée. Comme l’eau apparemment tranquille d’un étang lorsque, de proche en proche, le choc d’une pierre en brouille la surface et révèle la vase déposée sur les fonds.
Les États-Unis ont connu un premier choc. Les attaques du 11 septembre sur un sol jusque là épargné de toute agression extérieure ne cessent de propager leurs effets : durcissement des lois sécuritaires, affaiblissement des équilibres entre les pouvoirs, polarisation de la vie politique. L’essentiel a-t-il été atteint ? Le respect des libertés, le pragmatisme constitutionnel, la négociation entre intérêts sont toujours au cœur de cet « essentiel » pour les Américains. Mais les remous actuels interrogent sur le poids de l’argent, sur les tentatives d’une vision impériale et le repli sur les valeurs. Il est trop tôt pour un diagnostic arrêté. Le trouble rend les choses confuses. D’une certaine manière, l’élection présidentielle pourrait être décisive, mais le résultat en est bien incertain. Le souhait du Président de se faire réélire est manifeste. Qu’il l’emporte, et le pouvoir républicain serait conforté. Un démocrate changerait-il profondément d’attitude sur les sujets qui engagent les intérêts vitaux des Etats-Unis ? Rien n’est certain non plus.
L’avenir est donc remis au « peuple », qui doit choisir dans cette incertitude. Jugera-t-il légitime de rester en « guerre », ou voudra-t-il tourner la page ? La démocratie, qui souffre parfois des états d’exception, ne tient que dans cette capacité des institutions à permettre aux individus de réexaminer les choix, et ainsi de retrouver un équilibre plus calme entre les pouvoirs. Elle peut être troublée transitoirement, ou durablement…