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Dossier : Les promesses du rural

Sociabilités dans le monde rural


Resumé Lieu de proximité, de solidarité, de rites partagés, les sociétés rurales se sont enracinées autour d’un patrimoine commun. Mais cet « en dedans » s’ouvre à de nouveaux venus, pour une nouvelle co-construction.

Projet - Lorsqu’on parle du monde rural, de quoi parle-t-on ? Pouvez-vous évoquer des situations précises au-delà d’une définition générale ?

Anne-Marie Granié - Il faut d’abord rappeler qu’il n’y a pas « un » rural, mais des campagnes. J’ai personnellement travaillé dans les campagnes de la Lomagne tarn-et-garonnaise ; du Segala et de l’Aubrac aveyronnais ; du Val d’Adour gersois et dans la vallée de Baigorry au Pays basque et de Saint-Savin dans les Hautes Pyrénées : des campagnes qui se situent à la limite extérieure de la « troisième couronne » présentée par Bernard Kayser 1, au-delà des espaces péri-urbains. On compte d’innombrables petites communes, de 500 à 2/3 000 habitants. Dans ces villages et bourgs-centre, la vie sociale et l’inter-connaissance sont fortes.

Dans les gros bourgs, cette inter-connaissance peut être grande pour un noyau de personnes traditionnellement installées mais elle est très diffuse pour les autres. A Sérignac (Lomagne tarn-et-garonnaise) ou à Moyrazes (près de Rodez), tout le monde connaît tout le monde. On continue à utiliser le nom de la maison pour parler des familles, celles qui sont de souche, qui sont « de là ». Ainsi, Annie de la Flore, une femme de quarante ans, habite à la maison « la Flore ». Les gens du pays utilisent ces noms entre eux. Quelquefois, ils disent aussi le nom du quartier, celui d’un ensemble de maisons réparties sur la partie de la commune. Mais les nouveaux arrivants, eux, sont appelés simplement par leur nom. Et si l’on n’a pas compris de qui l’on parle, on précise : « ceux qui ont acheté au... » : le nom du lieu-dit éclaire la réponse.

Dans cet univers, c’est le facteur qui a sans doute la meilleure connaissance des personnes et du territoire communal. Il continue à « porter les nouvelles », il les « colporte » au cours de sa tournée. Ma mère ne manque pas de lui demander des nouvelles du grand-père Flamens, qui est tombé de l’échelle... Le facteur est aussi celui qui découvre le premier les nouveaux arrivants. S’il est rarement originaire du village, il est quand même « de par là », de ces lieux que chacun connaît. Avec un groupe d’agricultrices, j’ai eu l’occasion de travailler sur cette perception du « par ici, chez moi ». Chacun définit son coin jusqu’à cette frontière virtuelle au-delà de laquelle il ne connaît plus personne. Dans l’Aveyron, en particulier, j’ai constaté la force de ce sentiment d’appartenance. Les « nouveaux arrivants », même après quinze ans, sont toujours « des pièces rapportées ». Ils savent qu’ils ne sont pas tout à fait de là, et les autres le leur font sentir.

Cette référence à l’identité locale demeure primordiale. « Si, dans le monde moderne, je ne sais plus tout à fait qui je suis, je sais encore d’où je suis 2. »

Projet - Dans les communes que vous avez étudiées, comment est configuré l’habitat ?

Anne-Marie Granié - De fait, les repères spatiaux sont très importants pour comprendre les sociabilités. Par exemple, dans la commune de Sérignac, très étendue, on trouve à côté d’un habitat groupé (le village) plusieurs fermes indépendantes. Certaines d’entre elles sont plus proches de la commune voisine, Larrazet : c’est là que ceux de 40-50 ans sont allés à l’école, qu’ils trouvent les services, les commerces... La pratique du territoire, le lien social, se font avec les voisins du bourg le plus proche. « D’ailleurs moi, sur l’adresse, me dit une habitante, je mets toujours Larrazet, le facteur le sait ! » Les habitants du nord-est se tournent vers Castelsarrasin, ceux du sud-ouest vers Beaumont de Lomagne. En un sens, Sérignac apparaît comme une commune par défaut. Ses limites remontent au dessin des frontières paroissiales.

Le village, pourtant, n’est pas en train de mourir. Il compte encore beaucoup d’agriculteurs, qui ne s’en sortent pas trop mal. Il y a des terres à ail, les « terreforts », et puis « la plaine ». On constate une hiérarchisation complexe de l’espace, à la fois implicite et explicite. Le jour de la fête du village, on assistait il y a peu de temps à une mise en scène des formes de sociabilité entre les agriculteurs de la plaine et ceux des terreforts. Les deux groupes rivalisaient au « tir à la corde ». Et toute la commune était témoin de cet affrontement symbolique. Aujourd’hui, on en parle encore.

Les solidarités jouent d’abord par quartier, c’est-à-dire un ensemble de hameaux. Dans un quartier, les gens se connaissent et sont liés par de multiples échanges, une aide en cas de coup dur dans le travail agricole, pour couper le bois, un dépannage... L’exclusion de ce cercle ne s’explique que par des « fâcheries » souvent anciennes, rares mais tenaces. Seul le décès permet une réconciliation. Tout le quartier se rend aux enterrements. « Il a fallu qu’il meure pour que nos familles se reparlent. » Ces conflits structurent la vie sociale, les paroles, les relations (« je ne m’arrête pas parce qu’il y est »).

Le facteur, lui, peut parler à tout le monde. Et il m’est arrivé dans mes recherches de jouer un rôle analogue ! « Je vous ai vue là-bas ce matin. Comment va Mme Untel ? » Celui qui se déplace est « pris en otage » : il peut raconter ce qui se passe.

Projet - Qu’en est-il du système foncier ? Comment traduit-il des rapports sociaux différents entre propriétaires, métayers et fermiers ? Et quelles sont les transformations de la maison agricole ?

Anne-Marie Granié - A Sérignac, la terre est essentiellement répartie entre des propriétaires et des fermiers. Les métayages n’existent plus depuis 1953. Quant à la maison, il y a des règles pour maintenir des formes patrimoniales. Cela me paraît important pour les sociabilités. La manière d’« habiter » est essentielle dans le cadre des constructions identitaires individuelles et collectives. Par manière d’habiter, j’entends d’abord le rapport à la maison : a-t-on envie qu’elle soit en résonance avec le lieu, avec le paysage ? Et comment l’habite-t-on ? Est-ce une maison où l’on ouvre les volets ? A-t-on planté des haies jusqu’en haut ? Dans ces villages, dans 98 % des cas, si les gens sont bien là, s’ils ont envie de rester, ils ouvrent leur maison.

Mais j’habite aussi un lieu par la manière dont je le parcours. J’habite une commune, un territoire : où est-ce que je vais ? Quels sont les chemins où je passe, qui je rencontre, et de quoi je parle ? Habiter, c’est investir pour faire vivre un lieu. Est-ce que je participe à telle ou telle association ou à telle fête, ou n’y vais-je jamais ? Faire des choses avec d’autres, c’est entrer dans un système d’échange : donner, recevoir et rendre.

On peut identifier plusieurs stratégies. Ainsi, ces nouveaux arrivants qui ont choisi un lieu parce qu’il représente pour eux une campagne « refuge ». Ils sont mal en ville, et ils pensent vivre mieux à la campagne. Mais ils participent peu aux formes traditionnelles de sociabilité collective, ils se replient dans une sorte d’exclusion volontaire, ou la partagent avec d’autres, aux motivations semblables. Invitée récemment, dans le Lot, à une soirée-débat organisée par une association et des élus, j’entendais décrire la situation d’un groupe considéré comme des « marginaux » dans un village : « Ils sont une douzaine. On ne les voit pas, ils ne viennent ni aux fêtes ni aux soirées. »

Tout autres sont ceux qui décident de terminer leur trajectoire professionnelle à la campagne. Ils n’y trouvent pas de possibilités d’avancement professionnel, mais veulent bénéficier d’une autre qualité de vie. Il s’agit là surtout de personnes qui appartiennent aux « classes moyennes » et qui sont en quête de liens sociaux. Enfin, il y a des gens au chômage depuis un certain temps. « On arrivera toujours à cultiver son jardin ! Etre au chômage à Toulouse ? Je serai toujours mieux dans une campagne gersoise avec un petit boulot. » Dans tous les cas, la campagne, c’est mieux : on ne passera plus inaperçu, on sera connu et reconnu. Aujourd’hui, on revalorise la campagne : aller à la campagne, avoir une maison à la campagne, partir en vacances à la campagne...

Parmi les agriculteurs, de nouvelles stratégies se font jour également. Dans les communes, on voit de plus en plus de paysans qui proposent des services (chambres ou tables d’hôtes...), ou qui pratiquent plusieurs activités sur l’exploitation. Dans les couples, l’un des deux travaille souvent à l’extérieur, et ce n’est pas forcément la femme. A l’inverse des plus anciens, les personnes d’une cinquantaine d’années n’ont pas envie de baisser les bras. Elles sont soucieuses de ce qu’elles transmettront à leurs enfants et petits-enfants. Mais l’histoire de l’agriculture a réellement pris un tournant avec les débats autour des OGM, de la vache folle, etc. Elle connaît actuellement une véritable crise identitaire. Les schémas traditionnels de transmission du patrimoine (l’aîné reprenait la ferme, le second se débrouillait...) sont bousculés. Entre la peur d’engager l’enfant dans un métier dans lequel on est mal et les stratégies de transmission d’un patrimoine que l’on veut faire vivre (la terre, l’ancrage), un patrimoine qui est économique mais aussi le lieu d’un rapport affectif, le paradoxe peut-il être surmonté ?

Projet - Dans les campagnes, rencontre-t-on encore des formes ancestrales d’exclusion, des accusations de sorcellerie par exemple ?

Anne-Marie Granié - Enfant, j’ai entendu parler de sorcellerie. Aujourd’hui, celle-ci ne sert plus d’explication ni de référence. L’évocation d’un « mauvais sort » n’est plus reprise. J’entends plutôt l’expression : « Il faut se méfier ». Cette méfiance prend des figures diverses, surtout vis-à-vis de l’autre, de l’inconnu qui arrive dans la commune. A Sérignac, par exemple, où des Hollandais se sont installés pour faire de l’élevage, combien de temps faudra-t-il pour les accepter ? « Ils ont l’air bien, mais on n’est pas tout à fait pareils. » On se méfie aussi de ceux qui ne sont pas « dans son registre », les agriculteurs « bio » par exemple. A fortiori de ces jeunes qui veulent s’installer comme agriculteurs, quand leurs parents ne le sont pas, principalement dans des communes où les « formes traditionnelles » tiennent toujours une grande place.

Les rites chrétiens rassemblent la communauté. La fête de la Toussaint, par exemple, représente un temps de sociabilité fondamentale. Tout le village y participe : les familles se retrouvent, les enfants partis à la ville reviennent ce jour-là. Les plaques minéralogiques des voitures garées dans le village mettent en évidence l’importance de ce rassemblement. J’en ai vécu un autre, lors du décès du curé de Sérignac ! Tout le monde a voulu s’approprier la mort de « notre curé » : les associations, le troisième âge, la mairie, ceux qui vont à la messe et ceux qui n’y vont pas. Certains ont voulu écrire dans le bulletin paroissial, d’autres dans La Dépêche, certains ont demandé une plaque commémorative, d’autres se sont proposés pour récolter des fonds. Mais les rites « laïques » tiennent aussi une grande place : les cérémonies au monument aux morts sont très importantes. L’enjeu de la mémoire est très vif. Les enfants de l’école portent un bouquet au monument, le maire fait son discours, c’est l’occasion pour l’instituteur d’expliquer le sens de cette cérémonie, de travailler avec les familles (avec appel au témoignage du grand-père)... Cette transmission de la mémoire collective est essentielle. Elle a toujours existé, et je me demande même si elle n’est pas plus forte aujourd’hui !

Moi-même, j’accompagne ma mère au cimetière depuis ma jeunesse (elle a perdu deux de ses fils). C’est là que j’ai découvert toutes les familles de Sérignac. Le cimetière est toujours un lieu pertinent pour percevoir le continuum de cette communauté. Le rapport aux morts permet aux vivants de vivre en paix, sous la forme de cette relation absence/présence décrite par Martine Segalen 3. La Toussaint, c’est l’inscription dans un lignage, c’est l’occasion de retrouver la famille élargie, du resserrement de la communauté. Il y a des gens qui ne se rencontrent qu’à cette occasion. « Ce jour-là, on voit tout le monde. » La représentation de ce lien renforce le sentiment d’être « de quelque part ». Le conseil municipal de Sérignac a choisi d’agrandir le cimetière pour répondre aux demandes de tous ceux qui voulaient être enterrés là, ceux qui étaient partis depuis trente ans à Marseille, comme ceux plus récemment arrivés qui ont déjà acheté une concession !

La fête du village est un autre moment capital : on est à la fois dans le reconstruit et le continuum. Observons comment sont organisées les fêtes de village, notamment en Lomagne ou dans le Val d’Adour. Durant deux ou trois jours de fête, il y a le bal musette, où l’on retrouve les anciens, mais aussi toutes les générations, puis il y a une fête plus « rock », pour les plus jeunes. Et entre les deux, le dimanche bien souvent, place pour « le grand orchestre ». Dans nombre de communes de Lomagne, le lundi est une fête « entre-soi ». « Que les gens des communes voisines viennent, cela ne nous intéresse pas. » On organise un petit bal musette avec peu de musiciens, on prend le repas en commun le soir, on parle de ceux qu’on a vus les jours précédents. C’est tout un rituel. Et ce sont les jeunes qui le portent, bien plus que ceux de soixante ans !

Projet - L’organisation de certaines manifestations festives, conçues « pour attirer le chaland » (le défilé, les chars, etc.) n’est-elle pas ressentie, parfois, un peu comme une corvée ? Comme un devoir imposé ?

Anne-Marie Granié - Dans les communes où j’ai travaillé, c’est majoritairement ceux qui sont « de là » qui s’occupent de la fête. Quelques nouveaux arrivants rentrent dans le groupe, et saisissent cette occasion comme un levier d’intégration. S’agit-il vraiment d’un devoir ? Plutôt d’un de ces rites initiatiques par lesquels il faut passer, à travers lesquels on fait ses preuves.

Je voudrais vous raconter une anecdote. J’ai reçu un coup de téléphone hier m’invitant à Sérignac dimanche midi, pour le départ en retraite du facteur. Toute la commune doit participer à un pot au foyer rural. N’est-ce pas l’expression d’un certain rapport à la communauté, d’une appartenance, de la reconnaissance d’un temps partagé ?

Projet - Et le mariage ?

Anne-Marie Granié - On se marie toujours ; on se marie traditionnellement dans le village de la fille, sauf dans de rares cas. Ce qui a changé, c’est le repas de mariage, servi maintenant au restaurant. L’apéritif, lui, peut se prendre à la maison, quand on a de l’espace, ou au foyer rural.

Nous étions récemment invités à un « grand » mariage à Sérignac (deux cents personnes à l’apéritif), avec les familles, les invités du village, les collègues, enfin, tout le quartier. Le mariage a commencé le matin à la mairie, s’est poursuivi par la cérémonie à l’église, puis ce fut « l’apéro », de midi à deux heures, devant la ferme, dans le pré joliment décoré et aménagé pour la réception. Nous étions invités à la soirée qui terminait cette journée dans une salle des fêtes au bord d’un lac (le foyer rural de Sérignac était trop petit !). La disposition des tables était très classique : les mariés avec leur famille, les autres tables plus ou moins lointaines étaient organisées par affinités ou par connaissances, les hommes et les femmes placés « en alternance »... Il y eut aussi la prise de nombreuses photos, qui ont remplacé « la photo » traditionnelle : d’abord, les mariés avec « les petits », les enfants d’honneur, puis avec la famille du marié, enfin avec celle de l’épouse. On continue avec les témoins, les meilleurs amis, et, enfin, « par vagues », les amis, les connaissances...

Projet - Comment parler de ceux qui doivent cesser leur activité ?

Anne-Marie Granié - C’est une épreuve, déjà, d’arrêter physiquement de travailler la terre. La génération de mes parents, chez les hommes du moins, l’a très mal vécue. Les femmes, elles, avaient tellement intégré la domination masculine, que, de toutes façons, elles tenaient le coup.

Mais elles ont été les premières à pousser les enfants hors de l’exploitation agricole. Aujourd’hui, les arguments ont changé : la terre n’est plus ce métier « dur et salissant », les campagnes ne sont plus « en retard ». Mais on dit : « Regardez ce qui nous arrive, faites plutôt des études pour pouvoir vous en sortir. » Les femmes ne vivent pas l’arrêt de l’activité comme les hommes, sauf celles qui sont à la tête d’une exploitation, avec de vraies responsabilités. Elles maintiendront jusqu’au bout les « trois poules » et le jardin potager, qui font partie de la « qualité de la vie ». Elles vendent leurs œufs, leurs légumes. Autour de cette activité se créent des nouvelles sociabilités intéressantes.

L’entrée en maison de retraite, quand la nécessité l’impose, est plutôt mal vécue. On ne peut pas faire autrement, mais cette solution n’est pas bien vue. Les campagnards ont une culture de la place des personnes âgées : on les garde à la maison. Si l’on entend aussi le discours de l’intérêt de recréer une communauté d’âge (« il serait mieux avec d’autres »), en réalité ce départ représente toujours un arrachement pour ceux qui sont nés dans un endroit et y ont vécu. Aller à l’hôpital, en revanche, n’induit pas les mêmes représentations. Normalement, on y va provisoirement, pour se faire soigner. Partir en maison de retraite, c’est changer de maison : « C’est là que je vais mourir. »

Projet - Finalement, l’espace rural reste un lieu de sociabilité originale ?

Anne-Marie Granié - Les ruraux se sont appropriés leur espace. Et cet espace approprié est devenu un territoire. A Toulouse, je suis dans un grand espace. A la campagne, je suis dans un territoire. Peut-être les urbains voient-ils leur territoire dans leur quartier.

Mais je voudrais encore évoquer les recompositions actuelles : c’est un fait social que de nouveaux arrivants peuplent les campagnes et engendrent de nouvelles formes de sociabilités. Parmi eux, certains cohabitent seulement, d’autres participent à une co-construction. Les formes de sociabilité ancienne qui perdurent peuvent voisiner avec d’autres, là surtout où la population endogène demeure majoritaire. Mais, contrairement à l’opinion de Philippe Perrier-Cornet et Bertrand Hervieu 4, pour qui le rural n’existe véritablement que si on lui assigne des perspectives, je crois que le rural s’assigne aussi lui-même ses définitions. Il est capable de susciter d’autres sociabilités, à partir des qualités ressources autour des patrimoines paysagers ou/et bâtis, réhabilités collectivement ; autour des nouveaux rites de « santé », par exemple les randonneurs pour lesquels on prépare goûters et tablées avec des produits du terroir, etc. Ce bricolage entre nouvelles et anciennes formes permet de faire revivre un patrimoine. Bien des personnes ou des groupes cherchent à retrouver des racines, ils ont besoin de s’appuyer sur des formes historiques, sur des mythes ou des réalités qui vont contribuer à leur construction.

La campagne ? Ce sont des terres et des paysages, une diversité de gens, certains venus d’ailleurs ou partis ailleurs et qui reviennent. Elle est passée par des phases de construction et de déconstruction. La construction d’une société rurale aujourd’hui est lisible dans les formes du lien social, qu’elle continue à entretenir, à retrouver, à trouver.

Dans l’espace rural coexistent ceux qui y vivent, ceux qui y passent le week-end, ceux qui le parcourent en randonnées. Le rapport temps/espace dessine de nouvelles figures. Les sociabilités de l’en-dedans, de la proximité, de l’ordre d’un privé endogène (comme celles du quartier), et celles qui viennent du dehors, de l’exogène, qu’on a assignées aux campagnes, qu’elles ont récupérées en termes de nécessité, et qui vont permettre des co-réalisations inédites, sont-elles d’ailleurs si différentes de celles des fêtes de quartier en ville ?...



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1 / Cf. La renaissance rurale, A. Colin, 1990.

2 / Jean-Louis Guigou, alors président de la Datar, lors d’un colloque à Dijon en 1995 sur « Territoires ruraux et formations ».

3 / Rites et rituels contemporains, Nathan, coll. 128, 1998.

4 / Cf. « La transformation des campagnes françaises, une vue d’ensemble », in Philippe Perrier-Cornet, Repenser les campagnes, éd. de l’Aube, 2002.


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