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Dossier : Rythmes et temps collectifs

Entre mémoire et expérience, le passé qui insiste


Un événement est inachevé s’il n’est pas partagé. A partir de l’expérience de la société malienne, M. Leclerc-Olive montre comment l’irruption de la modernité s’inscrit dans cette tension : comment intriquer collectivement passé et futur pour échapper à l’imposition d’un présent perpétuel ?

Aujourd’hui, de l’Afrique à l’Amérique latine, les mouvements de transformations sociales, qui participent de dynamiques globales, s’inscrivent dans une tension entre passé et avenir. Les acteurs n’ont prise sur leur histoire qu’en inscrivant leur vie dans une mémoire collective. En effet, l’approche de la mémoire à partir des événements marquants montre que, pour qu’une brèche dans une histoire personnelle devienne un tournant, un repère apaisé de cette histoire, il faut que cet événement soit à la fois « partagé » avec des proches, et « sanctionné » par des institutions, ce qui lui confère, dans l’après-coup, un caractère éminemment social 1 . Par ailleurs, les événements qui orientent une vie ou attisent la mémoire sont souvent vécus d’emblée par plusieurs personnes, voire par une communauté. Le travail d’appropriation de l’événement est alors un processus partagé et sa mémoire, une mémoire « distribuée », comme on peut le dire de la connaissance distribuée entre humains et machines dans un système technique : tout autant que d’agrégation de mémoires individuelles, il s’agit souvent de « particularisation » d’expérience commune.

Prendre en compte cette tension entre passé et avenir, qui permet de rendre compte des processus de transformation des sociétés, impose un investissement conceptuel. Aujourd’hui, à la suite de Reinhart Koselleck, de nombreux travaux d’historiens utilisent le couple de concepts, de champ d’expérience et d’horizon d’attente, pour penser à la fois les temps historiques, et, plus fondamentalement, la matrice de l’action humaine. « La nécessité de rapporter l’un à l’autre, le passé et le futur, afin tout simplement de pouvoir exister, est inhérente à tout être humain. De manière plus concrète, tout homme, toute communauté humaine dispose d’un espace d’expérience vécue, à partir duquel on agit, dans lequel ce qui s’est passé est présent ou remémoré, et des horizons d’attente, en fonction desquels on agit 2 . »

Quelle distinction vise dès lors les termes de mémoire et d’expérience ? Pour R. Koselleck, « l’expérience va plus profond que la mémoire » tout comme « l’attente embrasse plus que le seul espoir 3 » : la faveur actuelle d’un usage public du passé – devoir de mémoire, demandes de réparation, commémoration – n’invite-t-elle pas à reprendre à nouveaux frais cette notion d’expérience ? Cette revitalisation de la mémoire n’est-elle pas affiliée à de nouvelles attentes, aux déceptions suscitées par des promesses non tenues ?

Je me propose d’éclairer cette tension entre mémoire et expérience, à partir de l’expérience recueillie et suivie depuis plus de quinze ans auprès d’acteurs « minuscules », engagés dans l’action publique, dans une zone du Sahel malien où la présence coloniale n’est pas un événement tout à fait apaisé. Mais, auparavant, je rappellerai quelques aspects de la théorie de l’expérience développée par R. Koselleck et je donnerai quelques repères contextuels sur la situation malienne.

Champ d’expérience et horizon d’attente

Deux aspects de la théorie de Koselleck retiennent notre attention : d’abord, sa conception de l’expérience est avant tout une expérience du passé 4 , d’un « passé actuel, dont les événements ont été intégrés et peuvent être remémorés. Dans l’expérience se rejoignent et l’élaboration rationnelle et des comportements inconscients qui ne sont pas ou plus obligatoirement présents dans notre savoir 5 ». Surtout, il va de soi pour cet auteur que l’« expérience provenant du passé est spatiale ». « Que toute expérience provenant du passé soit spatiale, cela a un sens, car elle s’agglomère en un tout, dans lequel nombre de strates des temps passés sont présentes en même temps, sans donner pour autant d’informations sur leur avant et leur après. Il n’existe pas d’expérience chronologiquement mesurable, mais bien une expérience datable suivant ce qui l’a fait naître pour la simple raison qu’elle se compose à tout moment de tout ce que l’on peut glaner dans les souvenirs de sa propre vie et de ce que l’on sait de la vie des autres 6 . » Cependant, d’après nos propres enquêtes sur les événements biographiques, il apparaît en général que l’impossibilité de mettre en intrigue les événements de sa propre existence – de les organiser temporellement – (ce qui requiert de multiples interactions avec autrui), induit une souffrance qui peut aller jusqu’à compromettre son propre rapport au temps quotidien.

Le second apport de Koselleck concerne sa réflexion sur l’écart grandissant entre champ d’expérience et horizon d’attente. « C’est dans l’espace de l’écart entre ces deux dimensions temporelles, que s’accomplit le temps historique. La preuve en est que cet écart entre champ d’expérience et horizon d’attente se modifie lui aussi, et est donc spécifiquement historique 7 . » Non seulement, l’écart entre champ d’expérience et horizon d’attente se modifie, mais il se creuse : c’est même ce qui caractérise les Temps modernes. « Au cours des Temps modernes, la différence entre expérience et attente ne cesse de croître, ou plus exactement les Temps modernes ne se saisissent comme temps nouveaux qu’à partir du moment où les attentes, dans leur impatience, se sont de plus en plus éloignées de toutes les expériences faites auparavant 8 . » Koselleck s’est particulièrement intéressé aux manifestations publiques 9 de l’agencement de cet écart, notamment à l’évolution de l’usage de notions comme Bund ou Geschichte, mais aussi à l’émergence de termes comme républicanisme ou socialisme. Pour lui, les concepts qui nous servent à penser l’action historique renvoient à une part de moins en moins grande d’objets d’expérience. « Il ne s’agit donc plus de concepts d’enregistrement de l’expérience mais bien plutôt de concepts fondateurs d’expérience 10 . » Cette affirmation mériterait d’être discutée pour les sociétés occidentales 11 . En revanche, elle est ajustée à la sémantique de la coopération internationale. Les concepts-projets, qui se veulent performatifs, sont très nombreux aujourd’hui dans ce champ où fleurissent des notions comme celles de société civile, de développement durable ou de biens publics mondiaux... La notion de décentralisation, centrale pour les situations concrètes que l’on va examiner à présent, relève pour une part importante de la même analyse.

Situations et initiatives sahéliennes

Au printemps 1999, pour la première fois sur l’ensemble du territoire national, les Maliens désignent au suffrage universel les conseils municipaux chargés d’administrer les 682 communes récemment créées. Ils vont enfin pouvoir décider localement des actions à engager pour leur développement, contrôler les élites chargées de mettre en œuvre ces programmes, bénéficier des avantages de la démocratie. Jusque là, l’autorité légale la plus proche des populations était le « chef d’arrondissement », nommé par le gouvernement. La préparation de cette réforme a donné lieu à de nombreuses concertations dans les villages (une commune est formée du regroupement d’une dizaine de villages en général) comme entre les élites politiques et l’administration ou les pouvoirs publics. Au niveau local, dès l’annonce du projet de décentralisation en 1993, celui-ci a été longuement discuté par les militants politiques comme par les chefs de village qui tentèrent de décrire la réforme dans les termes de leur expérience 12 . Parmi les militants, on trouve de nombreux anciens migrants rentrés au pays, notamment dans la perspective de développer leur région d’origine. Certains ont passé de nombreuses années en France où ils étaient parfois militants syndicaux ou politiques, souvent responsables d’associations de ressortissants porteuses de projets de développement. Ils ont participé aux actions engagées dans la seconde moitié des années 70 pour améliorer leurs conditions de vie dans les foyers pour immigrés. Fortement engagés au début des années 90 dans les luttes pour la démocratie et contre le parti unique, la création de collectivités territoriales leur est apparue comme une occasion de développer des pratiques démocratiques locales.

Pourtant, dès la fin des années 90, l’action de certains d’entre eux se détourne de ce champ pour s’investir vers d’autres modes de regroupements villageois qui ignorent la dynamique de constitution des communes. Ainsi, un djamanatigui, chef coutumier chargé de régler les conflits fonciers et les divorces, a été récemment intronisé. Il préside aux destinées d’un regroupement de villages qui épouse le territoire du Kaarta 13 , ancien royaume bien antérieur à la présence coloniale française. Assisté d’un conseil de sages, le djamanatigui est à la tête d’une organisation qui doit régler par

la médiation et la concertation les litiges fonciers surgis (ou ressurgis) à l’occasion de la constitution des nouvelles communes 14 . Il est inutile de souligner que cette initiative traduit la perte de confiance dans les dispositifs juridiques « modernes » pour traiter de ces querelles. Une telle initiative n’est pas restée secrète : la télévision nationale a diffusé la manifestation d’intronisation, qui a rassemblé un très grand nombre de personnes venues de tous les villages du Kaarta pour célébrer l’événement et dire leur allégeance au plus vieux d’entre eux. Dans le même temps, une association, le Kaartadjiké, animée par les militants à l’origine de cette dynamique, se présente comme association de développement et cherche auprès des partenaires de la coopération internationale des fonds pour des projets qui ignorent, dans leur logique même, l’existence des communes. Si l’on ajoute la création d’une association de la « jeunesse traditionnelle » qui s’est mise sous l’autorité du djamanatigui, on aura une idée d’un dynamisme parallèle au processus de décentralisation, lequel, à plus d’un titre, peut être considéré comme un effort entrepris par l’Etat pour moderniser et démocratiser la vie politique malienne. La création de ces nouvelles communes peut être interprétée par certains comme une menace pour les grandes familles dépositaires du pouvoir au sein des villages. Ainsi, dans les communes où le maire est issu d’une caste qui par tradition n’a pas accès au pouvoir, les chefs de village multiplient les marques d’insoumission à l’autorité municipale. Par ailleurs, aux yeux des villageois, la décentralisation peut être vécue comme une centralisation de fait : les équipements collectifs qu’ils ont réalisés peuvent y passer sous la responsabilité de la commune 15 . Comment interpréter cependant le fait que ces actions soient engagées par des leaders locaux considérés comme des forces politiques modernisatrices ? L’écart semble manifeste entre champ d’expérience et horizon d’attente lorsque l’on porte le regard sur les politiques mises en œuvre par l’Etat, avec l’appui des grandes agences de développement. Mais si l’on s’intéresse à l’organisation du champ pratique par les acteurs locaux, on observe une intrication très étroite entre l’expérience et les attentes.

Evénement et souvenir

Comment comprendre ce que l’on fait de son passé, de quelle manière et dans quelles conditions ce passé peut-il constituer un vivier de souvenirs utilisés pour imaginer des solutions aux problèmes à résoudre dans le présent ? Pour cela, il convient de distinguer les événements marquants des souvenirs qui « occupent », au sens spatial du terme, le calendrier scandé par ces événements. L’exemple d’expériences catastrophiques, comme la Shoah, éclaire, par son caractère limite, les ressorts de la transmission d’événements, moins traumatisants dans d’autres contextes 16 .

Il y a des événements sans souvenir, pour lesquels c’est même précisément le défaut de souvenir qui fait événement. W ou le souvenir d’enfance de Georges Perec, par sa composition même, cherche à transmettre au lecteur quelque chose de l’événement douloureux, pour lequel l’auteur ne réussit pas à rassembler suffisamment de souvenirs 17 pour en faire le récit. Le montage force la collaboration du lecteur, le conduit à imaginer lui-même l’insupportable, cette vérité de l’événement introuvable. « Lire W ou le souvenir d’enfance est une vraie torture. C’est une machinerie à laquelle le lecteur doit collaborer pour accéder à l’insupportable, à cette vérité qui n’est pas dite et qu’il doit prendre en charge 18 . »

Ces événements traumatisants ne sont pas personnels : des événements semblables par ce qui les a rendus possibles ont été vécus par un grand nombre de personnes. Si aucun récit ne peut se constituer qui soit à la fois appropriable et reconnu par une instance sociale ou publique, l’événement ne peut être « pacifié », il ne peut se transformer en souvenir, en repère historique, par rapport auquel il est possible de « tourner la page ». Ces événements marquants, dont le tranchant n’a pu être réduit par une mise en récit « légitimée », peuvent se transmettre d’une génération à l’autre, par une infinité de micro-pratiques, voire de silences, au-delà de toute volonté délibérée. En témoignent notamment les expériences recueillies par Nathalie Zajde auprès d’enfants de rescapés des camps nazis 19 .

Plus généralement, les enquêtes sur les événements biographiques montrent comment les événements marquants, fussent-ils moins douloureux, doivent, pour devenir des repères calendaires ou simplement des souvenirs, avoir terminé leur parcours sémantique. Un événement inachevé, qui reste « en souffrance », pour ne pas avoir été partagé avec les proches, mais surtout pour ne pas avoir pu être inscrit dans un récit à la fois autorisé (proféré par l’instance sociale qui convient) et appropriable par la personne, (un récit « juste et légitime » à ses yeux), un tel événement se transmet, en dehors même d’un récit. L’écriture même de W ou le souvenir d’enfance nous en fait faire l’expérience. Il revient aux héritiers d’achever le parcours de ces événements non (encore) enchâssés dans une histoire et qui par là auraient pu être mis à distance, événements incorporés, passé non révolu, qui ne passe pas, événements-blessures, confiés en héritage et dont ils doivent répondre.

Inachèvement...

Revenons à l’action politique minuscule que nous avons rapportée plus haut. L’engagement dans un processus de décentralisation se double d’initiatives qui empruntent largement au vivier des expériences antérieures. Il ne s’agit pas d’une simple résilience d’un passé récent, mais d’une actualisation de pratiques appartenant à une période révolue : djamanatigui est le nom en langue locale de l’ancien chef de canton, auxiliaire de l’administration coloniale. Cette refondation d’une organisation socio-politique autochtone n’a que faire de la dimension symbolique qui pourrait être attachée à cette fonction liée au passé colonial. C’est une pure instrumentalisation d’une fonction détournée de sa mission initiale. Mais cette initiative est aussi le rétablissement d’une continuité interrompue : rendre justice

aux manières de rendre la justice qui prévalaient jadis, par la médiation

et la réparation concertée, manière de pratiquer la justice suspendue d’abord par la colonisation, puis par les Etats de l’indépendance, mais qui n’a jamais été oubliée.

Se mêlent ici un passé « refroidi », le personnage du chef de canton, souvenir qui a permis de trouver une forme pratique, distanciée de la situation présente 20 et de donner une figure au geste politique à accomplir, et un passé « qui insiste », sous la forme d’une mission à reprendre. Se donnent à voir, de manière intriquée, une mémoire apaisée qui enseigne et une expérience vive qui oblige, qui engage. La distinction entre événement – ici l’injustice vécue et jamais réparée – et souvenir – ce que le passé nous a appris – suggère de reprendre à nouveau frais la thèse de Koselleck selon laquelle ce qui caractérise la période historique, ou du moins la période de « modernisation » pour cette société africaine, serait l’écart croissant entre le champ d’expérience et l’horizon d’attente. Ce à quoi l’on assiste est au contraire une intrication étroite et créative entre passé et futur.

Pour analyser les rapports au temps des acteurs sahéliens, on ne dispose pas de textes, seulement de propos recueillis au cours d’interminables conversations où se disent la dette et le respect à l’égard des sages et des anciens, le devoir de leur être fidèle sans pour autant ignorer les problèmes nouveaux à résoudre. Le mouvement zapatiste, dont J. Baschet rapporte les conceptions du temps, offre, à l’inverse, de nombreux textes qui disent leur manière d’intriquer passé et futur. L’auteur montre en quoi ces textes proposent une alternative à ce qu’il appelle le présent perpétuel. Il désigne ainsi le temps de la pensée néo-libérale qui maximise l’écart entre le champ d’expérience et l’horizon d’attente. D’une part, il convient de s’émanciper du passé, d’oublier l’histoire, et d’autre part, cette pensée prétend, sinon prédire le futur, du moins s’autoriser d’une prescience pour formuler des pronostics qui n’ont en fait comme seul effet que de dissuader chacun de participer à l’orientation des politiques 21 , lesquelles sont déclarées inéluctables. L’horizon d’attente y est doublement réduit. Une première fois parce que l’horizon est délibérément éloigné, une seconde fois parce que le champ des possibles annoncés est drastiquement réduit. La pensée zapatiste se nourrit d’un rapport beaucoup plus complexe entre passé et futur que celui qui consiste à ne porter le regard que vers l’avenir. Ses textes revendiquent une intrication des temps, très semblable à celle que mettent en œuvre les hommes du Sahel. Contraints par les représentations inscrites dans la langue elle-même 22 , c’est en recourant à des énonciations à première vue paradoxales qu’ils formulent ce rapport au temps : « Somos la necia historia que se repite para ya no repetirse, el mirar atràs para poder caminar hacia adelante 23 . » Plus sans doute qu’un regard, c’est l’émotion d’une expérience passée, mais vive encore, c’est la souffrance ou l’injustice qui constituent notre héritage. Mais, écrit René Char, « notre héritage n’est précédé d’aucun testament ».

Michèle Leclerc-Olive



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1 / Michèle Leclerc-Olive, « Les figures du temps biographique », Revue internationale de Sociologie, vol. CIV, 1998.

2 / Reinhart Koselleck, « Temps et histoire », dans Romantisme. Revue de la Société des études romantiques, n° 56, 1987, p. 9.

3 / Reinhart Koselleck, Le futur passé. Contribution à la sémantique des temps historiques, éd. EHESS, 1990, p. 310.

4 / A la différence de J. Dewey, par exemple, qui étudie l’expérience que l’on fait, et non celle que l’on a eue. Voir par exemple, « Having an experience » dans The later works, 1925-1953, vol. 10, Southern Illinois Press, 1984.

5 / R. Koselleck, Le futur passé, op. cit. p. 311.

6 / Idem.

7 / R. Koselleck. « Temps et histoire », op. cit. p. 10.

8 / R. Koselleck, Le futur passé, op. cit. p. 323.

9 / Voir par exemple, R. Koselleck, « Les monuments aux morts, lieux de fondation de l’identité des survivants », dans L’expérience de l’histoire, Seuil-Gallimard, 1997.

10 / Ibid. p. 324.

11 / Nous disposons par exemple d’outils conceptuels et techniques pour analyser le présent.

12 / Les débats, parfois ardents, à propos de la traduction du terme « décentralisation » en bambara témoignent de l’irréductibilité de la réforme à des expériences antérieures.

13 / Territoire de la taille d’un département français environ.

14 / Comme chacun sait, la tenure de la terre dans cette région d’Afrique n’est pas régie par un droit de propriété individuelle. Une parcelle peut être exploitée depuis des années par un chef de famille sans qu’il en soit le propriétaire. L’affiliation d’un village à une commune peut dès lors être considérée par certains comme une rupture d’allégeance.

15 / Michèle Leclerc-Olive, « Les nouvelles collectivités territoriales entre aide internationale et pouvoirs locaux : légitimité instrumentale ou légitimité politique ? », in Y. Lebeau, B. Niane, A. Pirou, M. de Saint Martin (dir.), Reconfiguration sociale de l’Etat en Afrique, Karthala, 2003.

16 / Pour ne rien dire des expériences vécues aujourd’hui par les enfants dans les pays en guerre.

17 / Il s’agit du départ de la gare de Lyon, en 1942, alors qu’il ne reverra plus sa mère, victime des camps d’extermination nazis. « De ma mère, le seul souvenir qui me reste est celui du jour où elle m’accompagna à la gare de Lyon d’où, avec un convoi de la Croix-Rouge, je partis pour Villard-de-Lans. » W ou le souvenir d’enfance, Denoël, 1975, p. 41. La scène du départ est à la fois le centre de gravité du livre et le souvenir introuvable de la biographie de l’auteur.

18 / P. Lejeune, La mémoire et l’oblique, POL, 1991, p. 61.

19 / Nathalie Zajde, Enfants de survivants, Odile Jacob, 1995, p. 125.

20 / J. Baschet, « L’histoire face au présent perpétuel. Quelques remarques sur la relation passé/futur » dans F. Hartog et J. Revel (dir.), Les usages politiques du passé, p. 58.

21 / La pensée néo-libérale partage au fond avec les traditions révolutionnaires cette attitude qui consiste à prédire ce dont l’avenir doit être fait.

22 / « La nouveauté s’insinue dans le langage ancien qui permet de ne pas la voir », écrivait Michel de Certeau. Cité par Georges Vigarello dans Esprit, novembre 2002, p. 119.

23 / La revuelta de la memoria. Textos del subcomandante Marcos y del EZLN sobre la historia, San Cristobal de las Casas, CIACH, 1999, p. 219-220. Cité par J. Baschet, op. cit.


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