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Dossier : Marché, acteurs et règles du jeu

Cartel et régulation énergétique mondiale


A travers l’histoire de l’Opep, un regard sur un marché qui n’a jamais été un lieu de concurrence pure. Sa prise en main par un organisme capable de mener collectivement une politique de régulation de l’offre est-elle durable ? Ou le marché finit-il par déterminer les nouveaux prix d’équilibre ?

Quarante ans après sa création et alors qu’on la croyait soumise à des dissensions internes qui menaçaient de la perdre, l’Opep vient de réaffirmer le rôle déterminant qu’elle pouvait jouer sur le marché mondial du pétrole en période d’effondrement des prix. Après une moyenne proche de 18 $ au cours de la dernière décennie, le prix du baril de pétrole de mer du Nord (qualité Brent) était descendu à 10 $ fin 1998, sous l’effet d’un excédent de production. La baisse des recettes pétrolières dans les pays producteurs a ranimé les réactions défensives de l’Opep. Les dix pays de l’Organisation (Opep hors Irak), suivis par d’autres pays producteurs, décidaient des coupes drastiques de la production pour assécher le marché et faire remonter les cours. Cette stratégie s’est soldée par un résultat spectaculaire : à l’été 2000, face aux tensions dans les circuits d’approvisionnement des compagnies de raffinage, les prix sont montés à plus de 30 $ le baril. Les pays consommateurs ont alors tenté de faire pression sur les pays producteurs de l’Opep pour qu’ils réalimentent le marché. Aujourd’hui, la situation s’est assainie. Les stocks de brut dans les pays de l’Ocde sont en passe de se normaliser tandis que la vigueur de la demande pour l’année 2001 est compromise par le ralentissement de l’activité mondiale. Les prix du pétrole restent néanmoins supérieurs à leur niveau de moyen terme et l’objectif de l’Opep est de les y maintenir.

Cette reprise en main du marché par l’Opep en tant que cartel, c’est-à-dire une organisation capable de mener collectivement une politique de régulation de l’offre en vue d’agir sur les prix, a été d’autant plus inattendue qu’avec 35 % de l’offre mondiale, l’Opep n’occupe plus aujourd’hui une place centrale dans l’approvisionnement du marché. Néanmoins, compte tenu de son rôle d’appoint et d’intervenant à la marge sur le marché, elle continue d’avoir un rôle leader sur les mouvements de prix ; c’est ce que l’on a observé dans les années récentes. Elle dispose par ailleurs d’autres atouts pour se faire entendre :

– plus de 80 % des réserves mondiales prouvées (c’est-à-dire exploitables aux conditions économiques et techniques connues) sont localisées dans les pays de l’Opep, et plus de la moitié dans quatre d’entre eux. Ces ressources garantissent 80 ans de production, au rythme actuel d’extraction, contre 20 ans dans les zones hors Opep ;

– malgré les politiques de substitution et d’économies d’énergie menées depuis vingt ans dans les pays consommateurs, le pétrole reste une énergie stratégique et peu substituable à court et moyen termes (notamment dans les activités de transports et la pétrochimie). A plus long terme, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) prévoit même une légère augmentation de la part du pétrole dans la consommation mondiale d’énergie, jusqu’à 41 % en 2020 ;

– toujours selon l’AIE, la hausse de la consommation devrait se traduire par une dépendance accrue à l’égard de l’Opep. Compte tenu des réserves actuellement connues, la part de l’Opep dans l’offre totale doublerait pour atteindre 60 % d’ici à 2020 ;

– enfin, en dépit de la baisse tendancielle des coûts de production rapide dans les zones non Opep, la production Opep bénéficie d’un différentiel de rente qui demeure non négligeable.

Ce retour en force de l’Opep sur la scène pétrolière va-t-il être confirmé ? L’Opep a-t-elle les moyens de maintenir durablement les prix au niveau élevé de 25 $, comme elle l’affirme ? Ou bien cette cohésion n’a-t-elle été qu’une réaction défensive face à la chute des prix et qui s’ébranlera dès que les conséquences sur l’économie des pays producteurs seront effacées ? Auquel cas l’on reviendrait à la situation qui prévalait auparavant, où des entreprises concurrentes côtoyaient un marché cartellisé.

Le marché pétrolier a rarement été un lieu de concurrence. D’abord de type monopolistique lorsque l’industrie du pétrole restait localisée aux Etats-Unis, il s’est ensuite cartellisé autour de compagnies multinationales lorsque l’industrie s’est internationalisée, puis entre pays producteurs lorsque ceux ci ont voulu imposer un nouveau partage de la rente pétrolière. Jusqu’à la fin des années 80, les règles de concurrence n’ont véritablement pu être appliquées que pendant les périodes de transition.

Un marché d’abord cartellisé par les compagnies pétrolières

Jusqu’à la première guerre mondiale, l’histoire du pétrole s’est confondue avec celle des Etats-Unis, pays producteur et consommateur de l’essentiel de la production mondiale. Le pétrole était peu internationalisé. En amont de la filière, de multiples petits producteurs de brut foisonnaient tandis qu’en aval, très vite, les activités s’organisaient principalement autour de la Standard Oil Company of Ohio, de Rockefeller, placée très vite en situation de monopsone et quasi-monopole sur le marché des produits finis. A la Bourse du pétrole des premières années a succédé un système de prix « affiché » que l’on va retrouver pendant très longtemps. La compagnie fixe (et affiche) le prix d’achat du brut dans le cadre de contrats de livraison à terme.

L’obligation de démantèlement de la Standard Oil Company en 1911, le développement de compagnies multinationales en quête de nouveaux débouchés et de nouvelles sources d’approvisionnement (notamment au Moyen-Orient) internationalisent peu à peu l’industrie et ouvrent le marché à la concurrence. Malgré une demande en plein essor du fait de l’émergence de l’industrie automobile, on assiste à une augmentation de la production encore plus forte, ce qui fait pression sur les prix affichés. Ceux-ci baissent, au grand dam des compagnies pétrolières.

Cette situation prend fin en 1928, avec la signature de l’accord d’Achnacarry entre trois des plus grandes compagnies pétrolières (ou majors), auxquelles se rallieront quatre autres plus tard. Par cet accord, les sept majors se constituent en cartel et se répartissent le marché mondial (hors Etats-Unis), à partir des « positions acquises » par chacune. Des quotas de production sont établis. Des efforts de rationalisation sont entrepris dans certaines branches d’activités. Aux Etats-Unis, le contrôle

de l’offre s’effectue par le biais du gouvernement fédéral qui, sous couvert d’une politique de « conservation des réserves », contingentera la production.

A ce partage des ressources et de la production s’ajoute un système de prix mondial de référence spécifique. Tant que les Américains restent exportateurs nets de pétrole, la logique est simple : rendre le pétrole extrait aux Etats-Unis compétitif en alignant le prix mondial sur le coût technique de production d’un baril produit sur la côte est des Etats-Unis. Peu à peu, avec la dégradation de l’excédent énergétique puis l’apparition d’un déficit à partir de 1948, le mode de fixation du prix affiché mondial s’assouplit et tient de plus en plus compte des différentiels des coûts de production entre le golfe du Mexique et le golfe Persique.

La domination du cartel sur le marché s’estompe à la fin des années 50 sous la pression de la concurrence des entreprises publiques des pays consommateurs, et des sociétés indépendantes privées. La baisse des coûts de production multiplie les sites de production techniquement rentables. L’excès d’offre qui en résulte pèse sur les prix. En 1959 et 1960, les prix affichés du brut qui oscillaient autour de 2 $ le baril depuis 1948, sont réajustés à la baisse.

A la suite de ces baisses de prix, les principaux pays détenteurs de ressources voient se contracter leurs recettes fiscales tirées des concessions. L’absence totale de contrôle sur l’exploitation des puits, les concessions accordées sur de très longues périodes (de 50 à parfois 80 ans) et surtout un partage de la rente très défavorable aux pays producteurs nourrissent peu à peu un sentiment d’injustice dans ces pays.

En 1960, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) est créée entre cinq des principaux pays producteurs (Arabie saoudite, Koweït, Iran, Irak, Venezuela) 1 pour négocier un partage plus équitable du surplus, en particulier par le biais de la fiscalité. Cette situation tient plus d’une dizaine d’années. Mais la montée des tensions qui suit l’emballement de la demande après 1965, le rapide déclin de la production américaine après 1970 et la saturation des capacités de production, modifient les rapports de force entre l’Opep et les compagnies pétrolières. Les prix sont revus à la hausse tandis que les revendications de l’Opep se durcissent à l’aube des années 70.

Prise en main du marché par l’Opep après la segmentation de l’industrie

Les années 70 représentent un tournant majeur dans l’histoire de l’industrie du pétrole. S’inspirant de l’expérience mexicaine de 1938, plusieurs pays membres de l’Opep nationalisent la totalité des avoirs des compagnies étrangères opérant sur leur sol. D’autres accroissent de façon substantielle leur participation dans le capital des compagnies exploitantes. Les événements politiques renforcent la cohésion des pays arabes et, à l’occasion de la guerre du Kippour, l’Opep décide unilatéralement de faire passer le prix du brut de référence d’Arabie saoudite de 3 à 11,65 $ le baril à partir du 1er janvier 1974. Un embargo est décrété vis-à-vis des Etats-Unis et quelques autres pays.

Une telle révolution aura, par trois voies, des effets irréversibles sur le marché :

– Tout d’abord, la reprise en main des activités de production par les pays détenteurs des ressources rompt la logique d’intégration verticale de l’industrie. Jusqu’alors, les compagnies pétrolières contrôlaient l’ensemble de la filière, du puits à la pompe. Désormais, ce ne sera plus le cas.

– Cet éclatement entre l’amont et l’aval de l’industrie favorise les conditions d’émergence d’un marché du pétrole. Jusqu’alors, les achats de pétrole brut s’effectuaient surtout au sein des compagnies ou entre filiales ; les échanges sur le marché au comptant restaient inférieurs à 1 % et concernaient surtout les échanges de produits finis. Le système de prix affiché est abandonné en 1975.

– Enfin, le monde prend conscience du caractère non renouvelable du pétrole. La première conséquence en est de développer les investissements en recherche et développement pendant toute la décennie, et d’encourager la production en mer du Nord et au Mexique. Le deuxième effet est de justifier l’instauration d’une rente de monopole pour les pays producteurs.

A cette période, l’Opep couvre plus de la moitié de l’approvisionnement mondial. Les taux d’utilisation des capacités sont à leur maximum mais l’Opep, en particulier l’Arabie saoudite, parvient encore à répondre à une demande très dynamique.

La situation se durcit à l’aube de la révolution iranienne de 1979 et du conflit Iran-Irak en 1980. Les risques de rupture dans l’approvisionnement attisent les anticipations inflationnistes ; les clients se constituent des stocks de précaution. La demande augmente fortement tandis que l’offre de l’Opep plafonne. L’Arabie saoudite ne peut plus jouer son rôle stabilisateur. Entre le début de 1979 et la fin de 1981, les prix officiels sont multipliés par 2,5 pour atteindre 34 $.

L’émergence d’un vrai marché libre du pétrole se confirme. Les craintes de pénurie multiplient les échanges au jour le jour au détriment du marché à terme : en mars 1979, près de 20 % de la production Opep est commercialisée sur le marché au comptant. La poussée relativement plus rapide des transactions de brut sur ce marché provoque une hausse des prix au-delà de celles enregistrées sur le marché à terme. Les compagnies pétrolières sont obligées d’ajuster leur prix de référence et de s’aligner sur les nouveaux prix directeurs.

Mais, à la différence des années 70 où la hausse du prix de l’énergie s’était combinée au maintien d’une demande soutenue de produits pétroliers, le choc de 1979 entraîne une adaptation en profondeur de la demande. Des politiques actives d’économie et de substitution d’énergie sont élaborées pour réduire la dépendance à l’égard du pétrole. L’intensité pétrolière du Pib va décroître sensiblement dans les pays consommateurs. Aussi, la reprise économique qui s’amorce en 1983 s’accompagne-t-elle d’une demande de pétrole beaucoup moins dynamique qu’auparavant. Cette caractéristique ne va cesser de s’affirmer.

Pour maintenir les prix où ils se trouvent, l’Opep va amorcer un tournant dans sa stratégie, qui prendra effet en 1982 lors de la Conférence de Vienne. Cette année-là, l’Opep s’érige véritablement en cartel, destiné à défendre une politique de prix fort. Des quotas de production sont fixés pour chacun des pays membres. De fait, malgré des tendances latentes à la baisse, les prix restent élevés pendant la première moitié des années 80. Mais le coût financier est lourd. La baisse du coût marginal de production à partir du début de la décennie, combinée à des prix de vente élevés, ont ravivé la production du côté des pays non Opep. Fin 1985, la situation devient paradoxale. En poursuivant une stratégie de prix fort, l’Opep a perdu presque la moitié de ses parts de marché et de ses revenus tandis que les producteurs extérieurs à l’Organisation ont bénéficié à la fois de l’effet volume et de l’effet prix. Or la majorité des réserves mondiales demeurent concentrées au Moyen-Orient et les conditions d’extraction y sont toujours les plus rentables au monde.

Fin 1985, sous l’impulsion de l’Arabie saoudite, qui supportait une grande partie de l’ajustement, l’Opep décide d’abandonner son objectif de prix fort et relance sa production en vue de regagner ses parts de marché. Fin 1986, les prix chutent à 10 $ le baril, soit le niveau d’avant le choc de 1979. En termes réels, la baisse finit même par gommer une partie du premier choc. Mais nombre de pays producteurs ne peuvent supporter longtemps un tel manque à gagner. La détérioration de leurs rentrées fiscales et de leur solde commercial les contraint dès l’année suivante à adopter une stratégie plus consensuelle. En 1986, des quotas de production sont réintroduits pour tous les pays du cartel en dehors de l’Irak, et le prix officiel du baril de référence (Arabian Light) de moyen terme est fixé à 18 $, considéré comme un prix d’équilibre soutenable à moyen terme et acceptable par les pays consommateurs.

Les années qui suivent le contre-choc pétrolier sont assez calmes. Le prix du pétrole oscille autour de 17 $, si l’on exclut les mouvements de court terme et l’envolée de 1990 liée à la crise irakienne. Les compagnies opèrent en sous-utilisation de leurs capacités.

Pourtant, les résultats de cette politique de parts de marché s’avèrent mitigés. L’Opep a bien recouvré une partie de ses débouchés antérieurs. Sa part dans la demande mondiale a augmenté de 10 points pour se fixer à 35 % environ depuis 1992. Le ralentissement puis le recul de la production non Opep, en particulier aux Etats-Unis et dans l’ex-Urss, ont beaucoup aidé au mouvement. Mais par la suite, les autres producteurs sont arrivés sur le marché, en concurrence avec les pays de l’Opep.

Reprise en main du marché... par le marché ?

Au cours des dernières années, l’Opep semble avoir perdu une partie de son pouvoir de cartel sur le marché. En effet, plusieurs facteurs peuvent militer en faveur d’une relative éviction de son pouvoir.

D’abord, la demande mondiale de produits pétroliers n’augmente plus que de 1 à 2 % par an, contre 3,5 % en moyenne sur la décennie 70. Or cette hausse est faible en regard des possibilités d’approvisionnement du marché.

Du côté de l’offre, le retour de l’Opep est allé de pair avec la reprise de la production dans les autres pays. Depuis plusieurs années, en effet, de nouveaux pays producteurs sont apparus, qui ont bénéficié d’un phénomène que l’Opep avait sans doute sous-estimé : la baisse des coûts de production entraînée par le progrès technique. Ces 15 dernières années, en effet, les avancées en techniques d’exploration et de forage ont été spectaculaires (sismique en 3D, forage horizontal, possibilités de forage en eaux profondes). Les coûts de production ont ainsi pu être réduits de moitié par rapport à 1986, davantage encore aux Etats-Unis, et les réserves pétrolières prouvées – donc techniquement exploitables – ont augmenté prodigieusement.

Un autre facteur qui joue est l’indiscipline au sein même de l’Opep. La politique des quotas a du mal à être respectée. Les intérêts des uns et des autres ne convergent pas toujours. Les pays du noyau dur (Arabie saoudite, Emirats arabes unis, Koweït) possèdent les réserves les plus importantes et leurs coûts de production sont les plus faibles. La population est peu importante et le niveau de vie élevé. Les besoins financiers nécessaires à la stabilité économique et sociale sont moins pressants. Ces pays privilégient une stratégie de long terme. A l’inverse, le Venezuela, l’Indonésie et d’autres pays sont plutôt attentifs à la situation présente en raison d’une plus forte exposition aux contraintes financières. Ceux-là doivent dès lors valoriser leurs richesses dans un horizon très court.

Reflet du recul de la prédominance de l’Opep sur le marché, le développement des échanges sur le marché spot, surtout à Londres (IPE), impose le pétrole de mer du Nord (qualité Brent) comme brut de référence au détriment de l’Arabian Light. De même, les prix au comptant servent désormais de prix directeurs pour la quasi-totalité des contrats.

Cette perte relative de pouvoir n’a pas empêché l’Opep de fomenter un retournement spectaculaire du marché pétrolier au cours des dernières années. Néanmoins, l’objectif des 25 $ le baril que l’Opep s’est fixé à moyen terme pourrait être difficile à tenir, à moins que les tensions sur les capacités de production ne justifient un tel niveau de prix. Dans ce cas, ce ne serait plus l’Opep qui déterminerait ce nouveau prix d’équilibre mais le marché. En effet, après plusieurs années de faibles investissements, les capacités sont utilisées à des taux élevés dans l’ensemble du monde. Le besoin est devenu pressant aujourd’hui de les accroître.

Après ce rapide rappel historique, il apparaît que le marché du pétrole n’a jamais été un lieu de concurrence pure, si l’on excepte les années 20 et 60 qui ont servi de périodes de transition entre deux modes de régulation du marché. Depuis le début des années 90, la place laissée à la concurrence semble pourtant s’élargir, bien que le poids de l’Opep en matière de formation des prix reste encore déterminant. On peut supposer que ce mouvement se confirmera, et accompagnera la tendance à la libéralisation des marchés. Aujourd’hui, ces pratiques anticoncurrentielles vont clairement à l’encontre des règles commerciales, notamment celles édictées par l’OMC.

Quelles pourraient être les conséquences à long terme d’un tel changement ? Il faut souligner tout d’abord les limites qui pourraient apparaître au développement de la concurrence. L’industrie pétrolière est très capitalistique et à haut risque. Elle est donc très concentrée et le nombre d’intervenants est de fait limité. Cette configuration spécifique devrait rester. Par ailleurs, la répartition des ressources et les conditions de production favorisent certains pays qui pourraient naturellement se placer en position de price maker. Ce pourrait être le cas de l’Arabie saoudite, du Koweit et de quelques autres qui n’ont pas avantage à se lancer dans une guerre des prix.

Néanmoins, dans l’hypothèse où le marché deviendrait véritablement concurrentiel, on peut supposer que, à moyen terme, les prix du pétrole brut baisseraient du fait de la réduction de la rente pétrolière. La politique des quotas, même en étant mal respectée, pèse sur le marché et donc sur les prix. Aucune autre matière première industrielle n’a connu de telles hausses au cours des trente dernières années. Une deuxième conséquence devrait théoriquement apparaître : une plus forte volatilité des prix. Jusqu’alors, l’Opep vise à atteindre son objectif de prix en agissant sur son offre. En l’absence d’une telle coordination, les ajustements devraient se faire par les variations de prix. Cette remarque reste cependant très critiquable. Sur longue période, notamment si l’on inclut les deux chocs et le contre-choc, les prix du pétrole ont fortement varié, beaucoup plus que les autres matières premières. Par ailleurs, la sensibilité des prix du pétrole aux facteurs géopolitiques rend les prix de l’Opep particulièrement instables. Aussi, quel que soit le schéma retenu, la stabilité des prix du pétrole est loin d’être assurée. Mais en tout cas, ceux qui auraient le plus à perdre seraient sans doute les pays producteurs de pétrole.


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